Maroc : à l’Azalai Urban Souk, Khouloud Belkahia et Faiçal Zahraoui mêlent tradition et modernité

« Marrakech, capitale de la gastronomie » (5/6). À cette table du quartier de Guéliz, les deux jeunes chefs proposent une carte évolutive et nourrie de leur connaissance du terroir.

Faiçal Zahraoui, à l’Azalai Urban Souk. © Naoufal Sbaoui pour JA

Publié le 25 février 2022 Lecture : 3 minutes.

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Marrakech, capitale de la gastronomie : à la rencontre des grands chefs marocains

Issam Rhachi, Nargisse Benkabbou, Aniss Meski, Erwann Lance, Khouloud Belkahia, Faiçal Zahraoui. À Marrakech, la simple mention de leur nom donne l’eau à la bouche des gastronomes. Rencontre avec la nouvelle génération des grands chefs de la Ville rouge.

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« C’est notre nouveau cake sans sucre et sans gluten, ça vous dit de goûter ? » proposent Faiçal Zahraoui et Khouloud Belkahia, les fondateurs de l’Azalai Urban Souk à Marrakech. D’ordinaire, c’est le genre de question à laquelle on est tenté de répondre « non » poliment. Mais face à ces deux-là, auteurs d’une carte évolutive (deux fois par mois) et inventive, on se lance. Assis face à la cuisine de ce petit lieu bohème pensé par Khouloud avant que Faiçal ne la rejoigne aux fourneaux, on déguste le gâteau qui servira d’accompagnement au foie gras.

C’est (subjectivement) excellent, notre air étonné les fait sourire. Le cake est onctueux avec un léger goût de noisettes, alors qu’il n’en contient pas. Le secret de cette recette ? La curiosité de ces deux jeunes chefs et leur connaissance du terroir marocain. « On utilise de la farine de dattes que l’on fabrique nous-mêmes, à partir d’une variété extrêmement sèche. Lorsque ces dattes tombent des arbres, ce sont comme des cailloux. On les passe au four et on les transforme soit en farine, soit en sucre », explique Khouloud. Faiçal a mélangé cette farine, ce sucre, avec en prime du sirop de dattes. Et cette version révèle toute la saveur du produit.

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Burgers kefta

Quand de nombreuses adresses de jeunes chefs de Marrakech optent pour une cuisine du monde, à l’Azalai Urban Souk, on mange marocain. « Les gens ont envie d’autre chose », justifient-ils. Cette affirmation nous paraît contradictoire avec l’utilisation du foie gras. Mais le jeune cuisinier, concurrent de Top Chef du monde arabe et meilleur jeune talent Gault et Millau 2016, n’est pas d’accord : selon lui, on n’est pas forcé de manger les plats les plus populaires de la gastronomie locale pour manger marocain. « Il y a une carte au-delà du couscous et du tajine », sourit-il. Le foie gras fait partie de ces mets, préparé sur place, au Maroc.

La cuisine d’ici est traditionnellement un mix de cuisine juive, berbère et andalouse

On voyage beaucoup dans les assiettes de Faiçal Zahraoui : des gnocchis de gambas à la sauce tomate (maison), des mini burgers kefta, un steak de tomate taktouka œuf confit… On reste sur l’idée d’une panoplie étendue « parce que la cuisine d’ici est traditionnellement un mix de trois choses : la cuisine juive, la cuisine berbère et celle qui vient d’Andalousie. La richesse de cette gastronomie, c’est sa diversité », rappelle le chef dont tous les plats (de 90 à 175 dirhams, soit de 8 à 16 euros) racontent une histoire.

Couscous « signé »

Le vendredi soir, comme le veut la tradition, c’est couscous. Mais celui-ci est « signé ». « Selon les régions du Maroc, le couscous n’est jamais le même, explique Faiçal. Il y a des endroits où on le cuit à la vapeur trois fois, parfois six fois, certains le font avec du beurre rance, d’autres à l’huile d’olive. Parfois, on y mélange du lait. Quand j’étais petit, ma mère gardait les restes et y ajoutait un bouillon de poulet avec oignons, qu’elle faisait mijoter dans du lait, pour le lendemain. Ça faisait un tout autre plat ! À l’Azalai, le couscous est fumé. On s’est inspiré d’une technique qui consiste à brûler des herbes pour créer des fumées qui font fuir les mouches le temps du repas à la saison des grenades et des dattes. On l’a réutilisée mais directement pour cuire le plat. »

Quand arrive le dessert, on choisit celui du chef, son préféré, dont il dit qu’il pourrait « en manger tous les jours et toute la journée » : la forêt noire. Goût classique mais aspect revisité : elle est proposée dans un pot, comme les desserts que sa mère glissait dans la lunch box du petit Faiçal. « Elle gardait les gâteaux marocains cassés, les mettait dans un bocal avec une crème anglaise ou une crème à la fleur d’oranger. Le pot, c’est la façon la plus réconfortante de manger son dessert. »

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Retrouvez tous les épisodes de notre série « Marrakech, capitale de la gastronomie »

Épisode 1 : Au Douar, Issam Rhachi réinvente la cuisine des campagnes
Épisode 2 : Avec L’mida, Nargisse Benkabbou convertit la médina à la cuisine fusion
Épisode 3 : Au Petit Cornichon, Erwann Lance conjugue bistronomie et bonne franquette
Épisode 4 : Le Mouton noir d’Aniss Meski, une cantine entre junk food bien faite et cuisine du marché

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