Pendez-les haut et court !
Pour tenter d’enrayer la criminalité, et faute de moyens policiers suffisants, le pouvoir a rétabli la peine de mort. Mesure provisoire, assure la présidence…
Elle l’a fait. Le 22 juillet, Ellen Johnson-Sirleaf a promulgué une loi rendant les voleurs à main armée passibles de la peine capitale. Le Liberia devient ainsi le premier État à enfreindre le « Pacte international [ÂÂÂ] visant à abolir la peine de mort », qu’il a signé en septembre 2005. Pour justifier ce retour en arrière, la présidence invoque l’accroissement de la criminalité, particulièrement dans la capitale, Monrovia (1,5 million d’habitants). « Les citoyens avaient besoin d’entendre un message fort pour pouvoir dormir en paix », argumente le porte-parole du chef de l’État, Cyrus Badio, avant de rappeler que le texte émane d’une « volonté populaire » puisqu’il a été adopté par l’Assemblée et le Sénat.
En fait, selon la version officielle, la loi a avant tout un objectif dissuasif. Dans ce pays ravagé par près de quinze ans de guerre civile, les autorités sont incapables d’assurer la sécurité de la population. La plupart des policiers, formés par la Mission des Nations unies, ne sont pas armés, tandis que, parmi les habitants, les kalachnikovs circulent encore. Les ex-miliciens sont sans emploi. L’extrême pauvreté domine. Tout cela constitue un terreau propice à la criminalité.
Quotidiennes à Monrovia, les attaques à main armée se déroulent selon un scénario bien établi : les bandits tirent en l’air pour semer la terreur, pénètrent de force dans les maisons et repartent avec quelques dollars, des bijoux, des téléphones portables ou un lecteur de DVD. « S’il n’y a rien à voler, ils violent ta femme », ajoute Zoom, un habitant. Dans l’incapacité d’arrêter et de punir les coupables – parmi lesquels se trouvent parfois des éléments des forces de l’ordre -, l’État agite le spectre de la pendaison pour dissuader leurs émules. « C’est une mesure d’urgence qui sera levée dès que notre police sera opérationnelle », précise le porte-parole de la présidence.
Compte tenu des moyens de la police, la menace n’est guère crédible. D’autant que « l’expérience montre que la peine de mort n’est pas un outil permettant d’enrayer la criminalité », rappelle Didier Beaudet, responsable de la commission pour l’abolition de la peine capitale à Amnesty International. Bref, un texte populiste qui crée l’illusion de la sécurité.
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