À l’heure des alliances stratégiques
En partageant leurs avions et en mutualisant leurs moyens, Air Burkina, la Compagnie aérienne du Mali et Air Uganda montrent l’exemple.
« Prête-moi ton avion, je te prête mon équipage ! » Une étroite collaboration s’est établie entre trois petites compagnies aériennes africaines : Air Burkina, Air Uganda et la Compagnie aérienne du Mali (CAM). Ces trois entreprises ont en effet décidé de s’échanger à la demande leurs avions. L’accord concerne également les équipages dans le cas d’Air Burkina et de la CAM, la barrière linguistique excluant Air Uganda. Cette collaboration trouve son origine dans l’actionnariat commun à ces trois compagnies : le Fonds de l’Aga Khan pour le développement économique (Akfed), qui a acquis 51 % de chacune d’elles lors de leur privatisation. Les cinq avions mis en commun sont tous loués à la filiale leasing du groupe de l’Aga Khan, la FinAircraft. Ces cinq McDonnell-Douglas MD-87 de 99 places (2 unités utilisées par Air Uganda, 2 par la CAM et 1 par Air Burkina, qui en attend une seconde pour septembre) ont encore en commun la même configuration intérieure et une décoration identique (décor intérieur et couleur de carlingue).
Mais l’assimilation s’arrête là. L’association préserve l’identité de chacune des compagnies : les avions affichent le nom de la compagnie à laquelle ils sont rattachés. S’y ajoute, écrit en plus petit, l’indication « Celestair », qui est le nom de l’alliance des sociétés aériennes africaines du groupe de l’Aga Khan « et également de toutes les compagnies de la sous-région qui voudraient en faire partie », précise le directeur général d’Air Burkina, Mohamed Ghelala, dans un appel du pied à l’élargissement de cette alliance. Rappelant que « dans le monde entier les plus grandes compagnies aériennes mettent en commun leurs moyens », le directeur général de la CAM, Abderahmane Berthé, regrette pour sa part que « cette alliance soit encore un cas unique en Afrique ». Au-delà des échanges de personnel et d’avions, Air Burkina et la CAM se concertent pour éviter de se faire trop directement concurrence. Elles coordonnent leurs horaires de vols et s’efforcent d’être complémentaires dans leurs destinations.
Partenariat avec Air Ivoire
Les deux compagnies ouest-africaines du groupe Aga Khan ont également noué un partenariat avec leur voisine Air Ivoire, avec laquelle elles partagent la location d’un Airbus A 319 dont le coût serait trop lourd s’il était pris en charge individuellement. Chacune exploite cet Airbus deux jours par semaine, le septième jour étant consacré au repos et à la maintenance de l’appareil. Air Ivoire utilise l’appareil de façon indépendante sur son réseau régional. Air Burkina et la CAM vont plus loin en se partageant la desserte de Paris, ce qui leur permet d’assurer ensemble quatre liaisons par semaine : Bamako-Ouagadougou-Paris pour Air Burkina et Ouagadougou-Bamako-Paris pour la CAM. Une cinquième liaison hebdomadaire est envisagée, à condition que la maintenance de l’Airbus puisse être effectuée de nuit.
Du côté de la CAM, dernière née du groupe Celestair, l’heure est au déploiement sur l’Afrique centrale. Issue de la privatisation d’Air Mali en 2005, la compagnie a inauguré ses dessertes sur Brazzaville en janvier et sur Douala et Libreville fin avril. L’ouverture de cette ligne sur le Cameroun et le Gabon a été rendue possible par la réception, à cette même date, de son deuxième appareil MD-87. Ses avions effectuent désormais les liaisons Dakar-Conakry-Bamako-Douala-Libreville et Dakar-Bamako-Cotonou-Brazzaville. « Nos vols sont proches de la saturation », se félicite Abderahmane Berthé, faisant remarquer que la défection des principales compagnies aériennes d’Afrique centrale a fortement réduit la fréquence des vols entre deux sous-régions, l’Ouest et le Centre. La phase de montée en puissance de la compagnie se retrouve dans ses chiffres avec une forte progression du chiffre d’affaires, qui, de 5,5 milliards de F CFA en 2007 (8,4 millions d’euros), devrait atteindre 20 milliards de F CFA cette année, selon les prévisions. Quant à l’équilibre financier, il n’est pas attendu avant 2010, le temps de digérer tous les investissements liés au démarrage de la compagnie et à l’ouverture progressive des nouvelles lignes. L’appui du puissant groupe de l’Aga Khan devrait permettre de passer cette phase sans encombre.
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