Turbulences marocaines

L’arrivée sur le marché de la compagnie de charters Mondair, concurrente directe de la RAM, suscite de vives résistances.

Publié le 4 août 2003 Lecture : 2 minutes.

Des touristes européens et des travailleurs marocains émigrés resteront-ils bloqués, cet été, sur les tarmacs des aéroports de Casablanca et de Rabat ? Telle pourrait être l’une des conséquences du bras de fer engagé entre la compagnie de charters Mondair et le ministère marocain des Transports. Objet du différend : les droits de trafic demandés par la première.
Créée le 19 juillet 2002 par des privés chérifiens au premier rang desquels les patrons de Safar Tours, une agence de voyages dont le siège est à Paris, Mondair est très vite devenue une concurrente de poids sur le marché du transport aérien marocain. Ayant acquis en leasing deux Boeing 737-300 de 145 places, elle a transporté, en un an, quelque cent mille passagers.
Pour assurer ses vols en direction de Casablanca, Agadir, Oujda, Rabat, Fès et Marrakech, Safar Tours affrétait jusqu’à présent des appareils de la RAM, dont elle était, de loin, le plus gros client. L’an dernier, elle a vendu plus de soixante-dix mille billets à des prix défiant toute concurrence : entre 200 euros et 360 euros l’aller-retour. Désireuse de poursuivre sa croissance, l’agence s’est donc lancée dans le transport. Un investissement risqué – Mondair perd de l’argent -, mais qui lui permet d’offrir un véritable plus aux Marocains, souvent d’extraction modeste, vivant en France. Et de participer, à sa manière, à la promotion du tourisme.
Pour faire face à une demande en forte augmentation, la compagnie a, au mois de mai, demandé à la direction de l’aéronautique civile, qui dépend du ministère des Transports, l’autorisation d’assurer deux vols supplémentaires à destination de Casablanca et de Rabat. Laquelle, un mois plus tard et à la surprise générale, lui a donné une réponse défavorable (voir fac-similé) et proposé d’autres destinations : Fès et Marrakech. Ce qui représente plus de trois heures de route supplémentaires pour une clientèle familiale généralement munie de nombreux bagages.
La riposte s’est aussitôt organisée : une pétition a été lancée et les signatures recueillies ont été directement déposées au Palais royal. Il est vrai que, comme chaque année, c’est Mohammed VI en personne qui supervise l’opération de retour au pays de quelque 2 millions de travailleurs marocains à l’étranger. Il se trouve qu’un nombre croissant d’entre eux souhaitent voyager par avion et que l’offre est loin d’être élastique : tous les avions programmés sont complets.
L’intervention du Palais a permis de débloquer la situation et, depuis, Mondair assure ses vols normalement. Mais le ministère des Transports n’a apparemment pas l’intention de lâcher prise. Selon nos informations, il souhaiterait interdire à Mondair, à partir du 1er novembre, tout vol en direction de Casablanca et de Rabat, et la cantonner à la desserte des villes secondaires. Sans doute pour préserver les intérêts de la RAM sur ce marché. Du coup, Mondair, qui envisage d’acheter trois nouveaux appareils, menace de transférer son siège social d’Agadir à Paris et de devenir une compagnie française. Ce qui lui permettrait, conformément aux accords bilatéraux en vigueur, de négocier librement son programme de vols avec les autorités marocaines. Lesquelles ne pourront que s’incliner car, étrangement, Air France, qui mise essentiellement sur la clientèle haut de gamme, ne semble pas s’inquiéter de l’arrivée d’une concurrente qui vise une clientèle à faible pouvoir d’achat.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires