Portes ouvertes

Publié le 4 août 2003 Lecture : 3 minutes.

La frontière ivoiro-burkinabè ne restera pas indéfiniment fermée. Et le train recommencera bien à siffler un jour entre Abidjan et Ouagadougou. Un jour, certes, mais quand ? La question était sur toutes les lèvres depuis trois mois, avec la reprise du dialogue entre les deux capitales.

La réponse est aujourd’hui connue : sauf ultime report, la frontière, close le 19 septembre 2002, sera rouverte le 12 août prochain. Pour marquer les retrouvailles entre ces peuples intimement liés par l’histoire, une cérémonie officielle a même été programmée. C’est en tout cas ce qui a été annoncé le 29 juillet par la présidence ivoirienne, après que le chef de l’État Laurent Gbagbo s’est entretenu au téléphone avec son homologue burkinabè Blaise Compaoré. Quelques jours plus tôt, le président du Faso avait d’ailleurs envoyé à Abidjan son ministre d’État chargé de l’Agriculture, Salif Diallo, probablement pour mettre la dernière main à cet événement tant attendu de part et d’autre, qui avait fait l’objet de rencontres bilatérales, y compris au niveau des états-majors. Le train va donc stimuler à nouveau l’activité commerciale tout au long de son itinéraire. Les responsables de Sitarail n’attendaient qu’un accord entre les autorités des deux pays pour desservir Ouagadougou. Le trafic avait recommencé en territoire ivoirien : jusqu’à Bangolo depuis le 22 mai, pour les marchandises, et jusqu’à Dimbokro depuis le 2 juillet pour les passagers.

la suite après cette publicité

En prenant leur temps, responsables militaires et politiques avaient, semble-t-il, à coeur de ne pas bricoler une réconciliation dans la précipitation. Histoire de tout mettre en oeuvre pour que les griefs exprimés de chaque côté ne puissent, à la première occasion, donner lieu à une nouvelle poussée de fièvre. Du temps, il en fallait pour que les Burkinabè soient assurés qu’ils ne feront plus, dans le train, l’objet de brimades de la part des forces de sécurité ivoiriennes. Il en fallait également pour convaincre les Ivoiriens que leur voisin du Nord ne leur chercherait pas noise et que la frontière serait parfaitement sécurisée.
Si le rendez-vous du 12 août tient ses promesses, s’il marque effectivement la fin de la période de tension la plus intense et la plus longue qu’aient connue les deux pays, les Burkinabè pourront alors pousser un ouf de soulagement. Car la crise ivoirienne a révélé la dépendance de l’économie du Faso à l’égard de son voisin du Sud-Ouest, mieux doté par la nature. Les commerçants burkinabè se sont, bien sûr, adaptés à la nouvelle donne, en expérimentant de nouveaux circuits d’approvisionnement depuis les ports de Tema au Ghana, de Lomé au Togo, ou de Cotonou au Bénin. Ils garderont dorénavant un oeil sur ces routes de substitution, au cas où… Mais les frontières, même officiellement fermées, n’étant jamais infranchissables, des femmes et des hommes ont continué à faire des va-et-vient entre Ouaga ou Bobo d’une part, et Korhogo ou Bouaké de l’autre. S’ils avaient attendu que leurs dirigeants aient résolu tous les problèmes de fond pour reprendre les affaires, la cola et l’attiéké ivoiriens auraient complètement disparu des étals des marchés burkinabè.

Le conflit aura toutefois eu des conséquences économiques désastreuses. Le Burkina est aujourd’hui plus fragile, éprouvé entre autres par les dépenses exceptionnelles engendrées par le retour de centaines de milliers de réfugiés. Mais l’économie ivoirienne aussi dépend de l’apport de la main-d’oeuvre burkinabè, notamment pour ce qui constitue sa principale richesse, les plantations de café et de cacao. Cette année, la croissance économique plafonnera à 2,6 % au Burkina. En Côte d’Ivoire, elle sera négative, autour de – 3 %. Que celui qui pense avoir gagné quelque chose lève le doigt !

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires