Bush comme en terre conquise

Publié le 4 août 2003 Lecture : 2 minutes.

Les photos de presse du voyage de George W. Bush en Afrique étaient accrocheuses : des clichés parfaitement composés. En Ouganda, le président américain se penche pour regarder dans les yeux un jeune orphelin victime du sida. À Pretoria, il embrasse chaleureusement le chef de l’État sud-africain Thabo Mbeki. Si les photographes avaient pointé leurs objectifs juste à côté, ils auraient révélé des scènes bien moins réjouissantes.

Au Sénégal, la première étape du voyage, la capitale a été complètement bloquée. Quelques jours avant l’arrivée de Bush, le 8 juillet, les hommes des services secrets américains ont envahi les hôtels et les night-clubs. Les résidents se sont plaints du bruit des hélicoptères dans le ciel de Dakar qui les empêchaient de dormir. Le téléphone a été coupé parce que tous ces « visiteurs » avaient besoin de 400 lignes téléphoniques.
Le lundi 7 juillet, la ville était bouclée et les principales artères fermées à la circulation.
Le lendemain, les Dakarois se sont réveillés dans une ville paralysée, bus vides et marchés morts.
L’avion présidentiel a atterri sur le tarmac de l’aéroport, totalement déserté. Dans le terminal, des journalistes qui avaient reçu l’injonction d’arriver à 16 heures se sont rués pour rejoindre leurs collègues autour des présidents Bush et Wade. Ils ont rapidement été repoussés par un membre de la sécurité de Bush. Michael Pelletier, l’attaché culturel de l’ambassade américaine a crié aux journalistes locaux « Retournez à vos stylos, ou aucun journaliste ne quittera l’aéroport. Je compte jusqu’à trois ! » Et Bush a limité à deux le nombre de questions posées par les seuls journalistes américains.

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Sur la route conduisant au palais présidentiel, des arbres, dont certains centenaires, ont été coupés. Avant la visite de l’île de Gorée, des officiers sénégalais portant des bérets rouges accompagnés par des officiels américains sont passés de maison en maison avec des chiens détecteurs d’explosifs. Les habitants ont été conduits sur un terrain de football clôturé par un grillage. Ils y ont été retenus sans nourriture pendant six heures, jusqu’au départ de Bush.
Les habitants de l’île soigneusement maintenus en quarantaine, George et Laura Bush ont visité la maison des Esclaves. Au-dessus d’un conduit d’air conditionné, le président a prononcé un discours à l’intention de 300 personnes triées sur le volet.
En début d’après midi, Air Force One décollait pour l’Afrique du Sud, et les habitants de Dakar et de Gorée, après plusieurs jours d’alerte générale, pouvaient enfin goûter un peu de repos. Plusieurs jours après le départ de Bush, les radios sénégalaises diffusaient la chanson de Youssou Ndour « Niak foulla ak fayda » dont les paroles moquent « les personnes qui manquent de personnalité et de dignité »…

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