RDC : des élections en 2023, ce sera compliqué, prévient la Ceni

Présentant la feuille de route de la commission électorale qu’il dirige, Denis Kadima a énuméré une série de contraintes – sécuritaires, financières et politiques – qui pourraient ouvrir la voie à un glissement. Au grand dam de l’opposition.

Denis Kadima. © Présidence RDC

Publié le 4 février 2022 Lecture : 3 minutes.

C’était sa première prise de parole publique depuis son entrée en fonction, en octobre dernier. Jeudi 3 février, devant un parterre de journalistes et de diplomates, Denis Kadima, le nouveau président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), a présenté sa feuille de route pour la période 2021-2027. Il a affiché sa volonté de respecter les délais constitutionnels pour l’organisation des prochains scrutins, mais la liste des difficultés qu’il a énumérées n’est guère rassurante.

Retards et incertitudes

Ladite feuille de route prévoit plusieurs grandes séquences. Entre janvier 2022 et juillet 2023 auront lieu les opérations de cartographie des sites d’identification et d’enrôlement des électeurs. Ensuite, à partir de juillet 2023 et pendant un mois, la Ceni réceptionnera les candidatures pour les scrutins directs (la présidentielle et les législatives). Les élections en elles-mêmes seront organisées entre septembre 2023 et décembre 2023. Viendront ensuite les scrutins indirects (élections des sénateurs et des gouverneurs) puis, dans le jargon de la Ceni, les activités de pérennisation du processus électoral, entre mars 2024 et mars 2027.

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Voilà pour la théorie. Mais tout cela s’annonce très compliqué, a aussitôt ajouté Denis Kadima. « Il faut noter que cette feuille de route ne peut se matérialiser que si un certain nombre de contraintes sont surmontées, a-t-il insisté, précisant que la Ceni [avait] fait un certain nombre d’analyses sans complaisance des risques qui pourraient affecter négativement la mise en œuvre de cette feuille de route ».

Les contraintes, a-t-il expliqué, sont d’abord politiques et sécuritaires. Et de citer « le retard de l’appui des institutions de l’État dans l’accompagnement de la Ceni » et « l’insécurité dans certaines zones du territoire national qui peut bloquer le déploiement du matériel, du personnel et les collectes de données ». Il a poursuivi en faisant état de fortes contraintes financières. « La non-reconnaissance de l’autonomie financière de la Ceni entache son indépendance. Il y a aussi l’incertitude quant au décaissement de fonds par le gouvernement. L’éventuel non-respect des engagements par les partenaires qui souscrivent pourrait avoir une incidence [sur le processus électoral]. »

Si on optait pour un deuxième tour à la présidentielle, cela aurait une incidence sur le budget des opérations

Et le fait que des voix s’élèvent dans l’opposition pour demander le retour à une présidentielle à deux tours pourrait aussi avoir un impact sur le chronogramme, prévient le président de la Ceni. « Il y a aussi des contraintes d’ordre légal et l’incertitude sur les grandes options politiques à lever dans le cadre des réformes électorales. Si on optait pour un deuxième tour à l’élection présidentielle, cela aurait une incidence même sur le budget des opérations. Même le vote ou non des Congolais de l’étranger, […] tout cela aura une incidence. »

Nouveau glissement ?

Autre difficulté que voit se profiler Denis Kadima : le fait que le gouvernement souhaite coupler un vaste recensement de la population au processus d’enrôlement des électeurs. « C’est de nature à retarder le processus électoral, déjà soumis aux contraintes constitutionnelles », prévient-il. Sans oublier les difficultés liées à l’épidémie de Covid-19, laquelle pourrait retarder les commandes et générer des contraintes logistiques.

Cela prépare [l’opinion] à l’impossibilité d’aller aux élections en décembre 2023

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Autrement dit, les difficultés s’annoncent nombreuses et l’opposition a immédiatement réagi en disant voir dans cette sortie de Denis Kadima la preuve que le président Félix Tshisekedi n’avait pas l’intention d’organiser les élections dans les délais, et ce en dépit des engagements pris. « Cette feuille de route ouvre la voie non pas au glissement mais à l’incertitude, affirme un proche de l’opposant Martin Fayulu contacté par Jeune Afrique. Cela prépare [l’opinion] à l’impossibilité d’aller aux élections en décembre 2023, conformément à ce que prévoit la Constitution. »

« C’est un ballon d’essai lancé par Félix Tshisekedi et sa coalition, abonde une source proche de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco). Denis Kadima est dans son rôle, il fait ce pour quoi il a été imposé à la tête de la Ceni. Nous les avons à l’œil. » Les avis ne sont pas plus optimistes dans l’entourage de Moïse Katumbi, lequel n’exclut pas de se présenter en 2023. « Les contraintes citées n’en sont pas, s’agace un proche de l’ancien gouverneur du Katanga, officiellement allié au chef de l’État. Avec de la bonne foi, tous les obstacles peuvent être levés. Le problème, c’est que la volonté politique fait défaut. Félix Tshisekedi n’a pas de véritable bilan et désire uniquement conserver le pouvoir. »

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