Israël bombarde Osirak

Publié le 5 juin 2007 Lecture : 3 minutes.

« Si vous êtes faits prisonniers, dites tout ce que vous savez. Vous croyez en savoir beaucoup, mais vous ne savez rien. Et cessez de manger des dattes, vous en aurez beaucoup en Irak. » Lorsque le général Rafaël Eytan, chef d’état-major de l’armée israélienne, donne les dernières consignes aux huit pilotes réunis autour de lui, il n’est plus question de revenir sur la décision. Le réacteur nucléaire irakien Osirak sera bombardé et détruit. Nom de code de la mission : « opération Opéra ».

Dans l’après-midi du 7 juin 1981, un escadron de huit chasseurs F-16 décolle de la base militaire d’Eilat (mer Rouge), survole à très basse altitude les déserts de l’Arabie saoudite, l’ouest de l’Irak, puis l’Euphrate, avant d’arriver au-dessus du site, situé à une trentaine de kilomètres au sud-est de Bagdad. « OK, pas de Mig en vue, lance un pilote. Voici les murailles du réacteur. Il y a des antennes. Je largue. » Entre la première bombe de 900 kg et celles que lâche le pilote du huitième avion, cinquante secondes se sont écoulées. « Il y a des flammes, de la fumée, le réacteur s’effondre », constate le pilote Ilan Ramon. Aussitôt, les huit F-16 rebroussent chemin en direction d’Israël : « Charly, tout le monde est vivant, l’objectif a été détruit, conformément aux plans », déclare un autre pilote. Mission accomplie. Dix soldats et un coopérant scientifique français trouvent la mort au cours de ce raid éclair.
C’est le 18 novembre 1975 que le Premier ministre français Jacques Chirac et le président irakien Saddam Hussein avaient signé un accord de coopération nucléaire. La France devait fournir à l’Irak deux réacteurs, Tammuz I et Tammuz II, « pour l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques ». Montant de la transaction : 1,45 milliard de francs français. Mais une phrase prononcée en septembre de la même année par Saddam avait fait bondir les dirigeants d’Israël : « L’accord avec la France est le premier pas concret vers la production de l’arme atomique arabe. » Dès lors, le Mossad et Tsahal mettront tout en uvre pour empêcher l’Irak de se doter de l’arme nucléaire. Si Saddam dispose d’une bombe atomique à une heure et demie de vol de Tel-Aviv, arguent les responsables militaires, cela signifierait tout simplement la fin de l’État juif.
Tenues dans le plus grand secret, les discussions autour des éventuelles représailles à mener contre les installations nucléaires irakiennes divisent les dirigeants israéliens. Si le Premier ministre Menahem Begin, le ministre des Affaires étrangères Itzhak Shamir, le ministre de l’Agriculture Ariel Sharon et le chef d’état-major Rafaël Eytan se prononcent pour une riposte brève et musclée, d’autres responsables, notamment le chef de l’opposition Shimon Pérès, estiment que la destruction des deux réacteurs serait considérée par l’Irak comme un casus belli susceptible d’avoir des conséquences dramatiques dans la région.

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La position des faucons finit par prévaloir. Aussi, pour éviter toute fuite sur le plan d’attaque d’Osirak, Rafaël Eytan demande à Menahem Begin de précipiter le raid. Bien sûr, le bombardement israélien provoque l’indignation des Arabes et suscite les vives critiques de la communauté internationale, y compris des États-Unis, pourtant fidèle allié d’Israël. Le 19 juin 1980, le Conseil de sécurité des Nations unies vote à l’unanimité une « condamnation vigoureuse » du raid. Sans plus. Pour justifier cette agression, Begin affirme que les deux réacteurs d’Osirak étaient sur le point de devenir opérationnels. Au mois d’octobre 1981, Michel Jobert, ministre français du Commerce extérieur sous le gouvernement de Pierre Mauroy, se rend à Bagdad pour une visite officielle. Au terme de son séjour irakien, il affirme l’accord de principe de la France pour la reconstruction d’un réacteur nucléaire. Un accord sur lequel Paris décidera de revenir en 1984.

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