L’ambassadeur d’Hillary
Quelle sera la politique étrangère de l’ex-First Lady, si celle-ci accède à la Maison Blanche en 2009 ? Réponse de Richard Holbrooke, son conseiller diplomatique, de passage à Paris.
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Honneur aux anciens, surtout lorsqu’ils semblent avoir l’avenir devant eux ! Le jeudi 24 janvier, la revue Foreign Policy recevait à Paris celui qui fut jadis son premier directeur de la rédaction : Richard Holbrooke, journaliste avant de devenir membre de l’administration Carter, puis ambassadeur des États-Unis à l’ONU, proche du président Bill Clinton et aujourd’hui conseiller pour les affaires étrangères dans l’équipe de campagne d’Hillary. Un homme qui, dit-on, pourrait devenir secrétaire d’État en 2009, si
Les visages de l’assistance se sont donc éclairés d’un sourire lorsque l’invité a pris la précaution très diplomatique de déclarer qu’il ne parlait qu’en son nom propre, tant le programme de la candidate s’inspire à l’évidence du décryptage de la situation mondiale produit par son conseiller.
Holbrooke ne tourne pas autour du pot : « Le futur président des États-Unis va hériter de la situation la plus difficile à laquelle son pays a jamais été confronté. Il aura sur le dos deux conflits à l’issue incertaine : l’Irak et l’Afghanistan. Et personne ne viendra lui tendre la main. Tous les sondages prouvent le déclin de l’influence de l’Amérique et sa mauvaise image, y compris chez nos alliés. Hier, 65 % des Turcs déclaraient être à nos côtés. Ils ne sont plus aujourd’hui que 9 % ! La première urgence des États-Unis sera de reconquérir leur leadership mondial. Mais comment plaider pour les droits de l’homme quand on défend la prison de Guantánamo ? Comment convaincre les autres quand on ne met pas soi-même ses propos en accord avec ses actes ? » Après ce bilan globalement négatif de l’ère Bush, Holbrooke détaille les urgences les plus pressantes.
L’Irak. « Chirac a eu raison contre Bush ! C’est notre problème. Ni la France ni l’Europe n’y peuvent rien. C’est à nous désormais de nous sortir de tant d’erreurs accumulées. »
L’Afghanistan. « Il n’est pas question d’accorder aux talibans un sanctuaire à la frontière pakistanaise. Cela, en revanche, c’est le problème de tous ! Faisons de l’avenir de ce pays le principal test de toute l’histoire de l’Otan. Mais, pour gagner, il nous faudra mettre fin à l’hébergement d’Al-Qaïda par les Pachtounes, dans un Pakistan décidément ingérable. Mais aussi résoudre l’énorme question de la drogue, suscitée par les talibans eux-mêmes, et régler le sort de la police afghane, une véritable épouvante, au contraire de l’armée qui est, elle So and so ! »
L’Iran. « Par bonheur, la guerre n’y est plus d’actualité grâce au récent rapport des seize agences de renseignements américaines, qui a changé la donne en affirmant que Téhéran a stoppé son programme d’armes nucléaires. S’y ajoute l’opposition de la quasi-totalité des militaires à l’intervention. Israël et Kissinger peuvent bien tempêter, la folie d’une attaque a bel et bien été évitée. Reste à ouvrir des négociations directes avec l’Iran, ce à quoi, curieusement, George W. Bush reste hostile. Ce sera la tâche du président élu, à condition que l’Iran ne s’y oppose pas ! »
Sur le Moyen-Orient, en revanche, Holbrooke est resté étrangement silencieux. Est-ce parce qu’il prône la non-intervention telle qu’elle fut pratiquée durant la majeure partie de la présidence Bush ? « Bien au contraire. Le futur président, quel qu’il soit – la bataille se jouera entre Hillary, Barack Obama et le républicain John McCain -, sera toujours le meilleur ami d’Israël. Mais le meilleur ami n’est pas celui qui soutient aveuglément n’importe quelle politique ! Je vais vous faire une confidence : Bill Clinton est un négociateur hors pair, très à l’aise sur le terrain du Moyen-Orient. Et bien, si Hillary est élue, je ne serais pas étonné de le voir reprendre la mission qu’il avait presque réussie au sommet de Taba, en 2001, à la fin de son mandat ! »
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