Algérie-France : dialogue de sourds

Publié le 3 décembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Un jour, c’est la lune de miel, le lendemain, la scène de ménage. Près d’un demi-siècle après la fin de la guerre d’indépendance, l’Algérie et la France hésitent toujours entre haine et amour. Les propos du ministre algérien des Moudjahidine (Anciens combattants), Mohamed Cherif Abbas visant les « origines » de Nicolas Sarkozy et le « lobby juif » qui l’a porté au pouvoir (voir p. 22) ont failli provoquer un incident diplomatique majeur, à quelques jours de la visite d’État du président français. Et il aura fallu l’intervention d’Abdelaziz Bouteflika lui-même, qui s’est entretenu par téléphone avec son homologue le 29 novembre, pour éteindre l’incendie qui menaçait de se propager.
Cherif Abbas, 71 ans, vétéran de la guerre de libération et membre éminent de la famille révolutionnaire, est un habitué des déclarations tonitruantes. C’est lui qui, en mai 2005, avait lu à Sétif un discours explosif sur les massacres du 8 mai 1945, comparant la France à l’Allemagne nazie. Il représente le courant ultraconservateur et nationaliste dont le principal « fonds de commerce » consiste désormais à s’en prendre à l’ancienne puissance coloniale. Un courant minoritaire en Algérie – les jeunes, qui représentent plus de 70 % de la population, n’ont cure de ces querelles sur la repentance – mais influent.
La sortie de Cherif Abbas a été perçue en France comme une provocation. À l’inverse, les Algériens avaient très mal vécu la loi, votée en catimini à l’Assemblée nationale, du 23 février 2005 dont un article vantait le « rôle positif de la colonisation ». Le traité d’amitié un temps évoqué entre Chirac et Bouteflika ? Mort-né, en grande partie à cause de cette affaire.
Si le couple franco-algérien n’en finit plus d’étaler au grand jour ses pommes de discorde – passé colonial, immigration, harkis, Sahara occidental, lutte antiterroriste -, il n’en demeure pas moins que les deux pays, pour des raisons évidentes de proximité et d’intérêts communs, ne peuvent plus se permettre de jouer plus longtemps ce « je t’aime, moi non plus » trop souvent répété. Les seuls politiques algériens qui s’expriment en dehors d’Abdelaziz Bouteflika ne parlent que de repentance. Sarkozy, lui, n’a que les mots Union méditerranéenne, nucléaire civil, contrat d’armement et immigration à la bouche. Un vrai dialogue de sourds auquel il serait grand temps de mettre un terme. Car c’est ce qu’attendent la plupart des Algériens, qui parlent français, consomment français, rêvent de Paris, regardent TF1, France 2 ou Canal +.

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