Référendum à hauts risques

Le projet de Constitution qui sera soumis à l’approbation populaire le 21 novembre prochain divise profondément le pays.

Publié le 3 octobre 2005 Lecture : 2 minutes.

Après quarante-deux ans d’existence, la Constitution kényane va connaître son premier lifting. Le projet de révision réussira-t-il à séduire la majorité des 11,8 millions d’électeurs appelés à se prononcer par référendum le 21 novembre ? Rien de moins sûr, au vu des débats houleux qui agitent la classe politique et la société civile.
Pourtant, cette nouvelle Loi fondamentale, tout le monde l’attendait avec impatience. Le président Mwai Kibaki, élu en 2002, s’était engagé à ce qu’elle soit promulguée dans les cent premiers jours de son mandat. Elle devait limiter le pouvoir présidentiel de manière à éviter la dérive autoritaire qui avait caractérisé les vingt-quatre années de règne de son prédécesseur, Daniel arap Moi. Vaines promesses ! Largement amendée par le Parlement, la proposition constitutionnelle adoptée en juillet dernier n’a plus rien à voir, d’après ses détracteurs, avec le projet initial, baptisé « avant-projet de Bomas ». Celui-ci avait été élaboré par une conférence nationale constitutionnelle (CNC) regroupant des délégués du gouvernement et de la société civile. Il prévoyait un exécutif bicéphale. Les 197 pages rendues publiques le 23 août stipulent, elles, que seul le chef de l’État pourra choisir le Premier ministre et le démettre de ses fonctions. Le Kenya risque donc, de nouveau, de tomber sous le coup d’un régime présidentiel fort.
Si les adversaires de cette nouvelle mouture ne manquent pas, ils viennent d’horizons divers. Parmi eux, Uhuru Kenyatta, le fils du premier président du Kenya indépendant, les congrégations chrétiennes qui s’insurgent notamment contre l’autorisation des tribunaux islamiques, ainsi que cinq membres du gouvernement. Tous s’estiment trahis par Mwai Kibaki et font campagne pour l’orange, le symbole du « non » – le « oui » étant représenté par la banane.
Ce projet de Constitution scinde véritablement le pays en deux et provoque de graves tensions avant même le début de la campagne officielle, prévu pour le 21 octobre. En juillet, Nairobi a été le théâtre de manifestations qui ont duré trois jours et se sont soldées sur un triste bilan : un mort et de nombreux blessés. Le week-end du 18 septembre a également été émaillé de violences. De New York, où il assistait au sommet de l’ONU, le président Kibaki a appelé ses concitoyens, qu’ils vivent au Kenya ou à l’étranger, à lire attentivement le texte, de manière à « décider de la destinée de la nation » en toute connaissance de cause. Ce premier référendum de l’histoire du pays coûte à l’État la bagatelle de 39 millions de dollars. Plus 50 millions pour la rédaction d’une Constitution qui, si elle était approuvée, entrerait en vigueur dès le 12 décembre. Au prix de la démocratie ?

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