L’Égypte change
Publié le 3 octobre 2005 Lecture : 1 minute.
Au cours de mes conversations au Caire, j’ai trouvé les gens étonnamment libres dans leurs commentaires. Et bien que la plupart considèrent la victoire de Moubarak – avec 88 % des voix – comme une farce, ils pensent aussi que l’Égypte est en train de changer.
Prenons le point de vue le plus critique envers le régime, celui des Frères musulmans. J’ai bu un café avec Ali Abdel Fatah, l’un de ses dirigeants. Il dénonce la victoire frauduleuse de Moubarak, mais il estime que le mouvement démocratique est une réalité. « Nous pensons que le pluralisme est une bonne chose, et nous le revendiquons », déclare-t-il.
Ali Abdel Fatah a été emprisonné onze fois pour délit d’opinion, et les Frères musulmans sont toujours officiellement interdits. Mais ils veulent faire partie du nouvel échiquier politique. Ils présenteront environ 150 candidats « indépendants » à l’occasion des élections législatives de novembre. Ils estiment qu’une trentaine remporteront un siège. Ce qui doublera leur présence non officielle au Parlement.
Dans un café de la rue Imad el-Din, Amin Soliman Eskander tire sur son narguilé. C’est l’un des fondateurs d’un groupe de protestataires connu sous le nom de Kifaya (« Ça suffit ! » en arabe). Même si les élections sont finies, le groupe continue d’organiser des manifestations. « L’heure n’est plus à l’oppression », déclare Soliman Eskander, qui a été emprisonné sept fois pour raisons politiques. Lorsqu’on lui demande s’il pense que le changement peut se faire de façon pacifique en Égypte, il répond : « Oui, bien sûr. »
Le régime de Moubarak est sans aucun doute capable de revenir sur ses promesses. Mais il y a une telle pression sociale en faveur du changement, qui provient de tant de gens différents, que cela ne sera pas chose aisée. « Je ne pense pas qu’on puisse revenir en arrière », m’a indiqué le fils du président, Gamal Moubarak. Et c’est vrai qu’actuellement j’ai plutôt tendance à le croire.
