Chine-Afrique : l’UA met le cap sur Pékin
Pour renforcer ses liens avec la Chine, l’Union africaine va y installer une mission permanente. Décision anecdotique ou nouveau jalon pour la Chinafrique ?
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 17 février 2022 Lecture : 2 minutes.
« Chinois », « Russes, « Turcs »… On retrouve presque systématiquement ces gentilés dans les micro-trottoirs donnant la parole aux citoyens ouest-africains en quête de nouveaux « best friends forever » internationaux. Ces puissances peu sourcilleuses sur les règles d’État de droit suscitent dans les pays de la région un intérêt gourmand. Notamment le géant des géants asiatiques.
Régulièrement décriée pour son europhilie zélée, l’Union africaine (UA) du Sénégalais Macky Sall s’apprête à ouvrir une mission permanente en Chine. La décision a été prise par les chefs d’État réunis à Addis-Abeba, lors du récent sommet de l’organisation panafricaine, dans le but de développer des relations plus directes, réactives et interactives avec l’empire du Milieu. La délégation expatriée étant susceptible de se limiter à une dizaine de membres, l’annonce doit-elle être vue comme une décision anecdotique ou comme une validation de ce qu’il est convenu d’appeler la Chinafrique ?
Loin d’être symbolique
Primo, si l’UA dispose déjà de telles missions auprès d’institutions supranationales comme l’ONU, l’OMC, l’Union européenne (UE) ou la Ligue des États arabes, il est à noter qu’elle n’en a très peu déployées auprès de simples États. Secundo, s’il faut attendre de voir si la liste des hauts fonctionnaires et chargés de mission formellement affectés à Pékin s’étoffera, la liste des sujets concernés – coopération technique, technologie, science et éducation, culture, tourisme ou engagement de la diaspora – est loin d’être symbolique. Et chacun pense évidemment à la coopération diplomatique avec la superpuissance asiatique, qui revendique aussi peu d’ingérence dans la gestion africaine de l’État de droit qu’elle n’en accepte sur son propre territoire, et à l’évidente coopération économique et commerciale entre les deux parties.
Pékin a réussi à compromettre progressivement la reconnaissance africaine de Taïwan
En dépit de la partielle paralysie marchande induite par la pandémie et les restrictions sanitaires, le commerce entre la Chine et l’Afrique n’a fait qu’augmenter, les échanges atteignant aujourd’hui plus de 254 milliards de dollars et faisant de Pékin le premier partenaire commercial de l’Afrique. En matière de pétrole ou de minerais, par exemple, l’Afrique du Sud, l’Angola, la RDC, le Congo ou encore la Zambie sont des exportateurs significatifs – de leur point de vue – vers la Chine. En matière d’investissements directs, Pékin est le quatrième acteur en Afrique, notamment dans la zone anglophone, même si le volume semble encore relatif vu de Pékin.
Si la relation économique est encore souvent qualifiée d’asymétrique et d’improvisée, l’Afrique n’est pas la seule à faire des pas en avant, notamment avec cette mission permanente annoncée. Tout en promouvant le Forum sur la coopération sino-africaine (Focac), dont la huitième Conférence ministérielle s’est tenue en novembre à Dakar, Pékin a réussi à compromettre progressivement la reconnaissance africaine de Taïwan, seul l’Eswatini faisant aujourd’hui de la résistance. Et la voix sinophile africaine est moins utile, pour la Chine, sur le continent noir que dans les arcanes de l’Assemblée générale des Nations unies…
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