Les transports d’abord

Dynamisés par le programme quinquennal d’investissements, les grands projets nationaux sont activement relancés.

Publié le 4 juillet 2006 Lecture : 6 minutes.

L’Algérie est en chantier. Dynamisés par le programme quinquennal d’équipement du pays lancé par le président de la République il y a un an, les grands projets d’infrastructures, dont certains étaient en souffrance depuis plus de vingt ans, sont relancés. Avec des échéances précises, notamment pour l’autoroute est-ouest, le métro ou le tramway d’Alger. Les retards accusés jusqu’ici n’étaient pas seulement dus à des problèmes financiers. La bureaucratie pesante et le laisser-aller des sociétés nationales y étaient pour beaucoup. Aujourd’hui, le recours massif aux entreprises étrangères pour la prise en charge des gros dossiers devrait changer la donne.

Autoroute : 1 200 km d’est en ouest
Dans un pays où le parc automobile ne fait que s’accroître et où 85 % des échanges de marchandises et de voyageurs se font par la route, le projet de l’autoroute est-ouest, quasiment au point mort depuis une décennie, est présenté par les dirigeants comme « le chantier du siècle ». Il l’est à bien des égards. Par son envergure, d’abord : deux fois trois voies sur 1 216 km qui compteront onze tunnels et 390 ouvrages d’art, dont 25 viaducs. Par son budget ensuite : il est doté de 11,4 milliards de dollars de financement, une facture que les autorités ont décidé de régler sur fonds publics. La construction de l’autoroute est inscrite parmi les dix projets prioritaires du plan spécial de relance 2005-2009.
Dans les appels d’offres, la complexité du chantier exclut de fait les entreprises nationales, privées ou publiques. Les sociétés algériennes sont « incapables de réaliser des projets d’envergure », n’hésite pas à dire le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul. Pour autant, les entreprises du pays espèrent bien profiter des retombées du projet, qui nécessitera forcément l’intervention de sous-traitants et devrait créer quelque 100 000 emplois directs. Pour la réalisation « clés en main », c’est un consortium japonais nommé Cojaal, comprenant six entreprises, qui s’est vu attribuer le tronçon est (399 km pour 5,2 milliards de dollars) et le groupement chinois CITIC/CRCC qui s’occupera des tronçons ouest (359 km pour 3,6 milliards de dollars) et centre (169 km pour 2,6 milliards de dollars). Le cahier des charges prévoit que le chantier durera quarante mois, soit une livraison à l’horizon 2009.
L’autoroute respectera pour l’essentiel le tracé des flux actuels, reprenant l’itinéraire des deux nationales qui relient Alger à Oran et Constantine, mais devrait avoir un impact socio-économique très important sur les régions traversées, notamment celles des hauts plateaux, à l’est du pays. Selon le ministère des Travaux publics, elle permettra une économie de temps, un trafic plus fluide, un transport moins onéreux et devrait réduire le nombre d’accidents. L’Agence nationale des autoroutes (ANA) a pour principale mission de rentabiliser l’ouvrage en instaurant, dès 2006, un système de péage. La création de sociétés concessionnaires est envisagée, comme chez les voisins marocains et tunisiens. Le taux de rentabilité de l’autoroute, dotée de 60 échangeurs avec option de péage, est jugé « très fort » par les autorités. L’autoroute algérienne s’inscrit dans le vaste projet d’autoroute transmaghrébine de 7 000 km, devant relier le Maroc à la Tunisie. Reste que le tronçon algérien se termine à l’ouest de Maghnia, avant la frontière algéro-marocaine, pour le moment toujours fermée à la circulation automobile.

la suite après cette publicité

Le futur ticket de métro à 25 dinars
Un métro à Alger ? Depuis 1982 qu’on le leur promet, les Algérois avaient fini par ne plus y croire. Le projet a été réactivé en 2003 et, aujourd’hui, les travaux de génie civil sont réalisés à 75 %. « Le métro sera livré en juillet 2008 », assure Abdelkader Mekrebi, PDG de l’Entreprise du métro d’Alger (EMA). La première ligne sera longue de 9 km, jalonnée de dix stations et conçue pour transporter, à terme, 41 000 voyageurs par heure dans chaque sens. Les travaux du tronçon entre la Grande-Poste et El-Hamma (4,5 km, 5 stations), lancés en 1990 par deux entreprises algériennes (Cosider et Génie Cosider), sont achevés à 98 %. Les travaux de génie civil du deuxième tronçon El-Hamma-Haï El-Badr (4,5 km avec 5 stations), lancés en novembre 2003, devraient être achevés au cours de cet été.
Les équipes du groupement d’entreprises algéro-allemand, Gamma (Dywidag, Cosider et Infrafer), travaillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre et 2 000 personnes sont sur la brèche. EMA a confié l’électrification des voies au français Alstom et la réalisation des équipements de la ligne au groupement constitué des entreprises françaises Siemens et Vinci et à l’espagnole CAF, qui fournira le matériel roulant, proche de celui utilisé à Madrid ou à Rome. Le contrat signé en janvier 2006 porte sur un montant de 380 millions d’euros et un délai de 36 mois. La pose des rails est prévue pour novembre prochain. Le ministère des Transports a annoncé que le métro sera « des plus modernes », presque totalement automatisé. Les autorités, à la recherche d’une « société expérimentée » avec laquelle signer un contrat sous forme de mandat de gestion et de maintenance, évoquent déjà le prix du futur ticket, qui pourrait être de l’ordre de 25 dinars (plus cher que le bus, mais plus rapide et plus confortable). Et parlent même de projets d’extension de lignes à l’horizon 2010-2011.

Tramway à Alger, Oran et Constantine
La construction de lignes de tramway est prévue à Alger, Oran et Constantine. Pour les trois villes, les autorités ont annoncé une mise en service en 2009. Le programme le plus avancé est celui d’Alger, qui a cruellement besoin de moyens de transport alternatifs aux bus et à l’automobile. Embouteillée quasiment du matin au soir, l’agglomération étouffe sous la fumée des pots d’échappement. Tenter de la traverser en journée relève du calvaire. Afin de réduire la congestion automobile et de désenclaver les grands pôles d’habitat situés aux périphéries est et ouest, le tramway apparaît comme la meilleure solution, avec un réseau qui viendra compléter celui du futur métro. À Alger, 38 stations et 22,3 km de rails sont prévus. Le premier tronçon prioritaire de 16,3 km reliera le centre-ville (carrefour des Fusillés) aux quartiers est (jusqu’à la localité de Bordj el-Kiffan). Il sera jalonné de 30 stations et pourra transporter jusqu’à 150 000 passagers par jour. C’est un consortium international dirigé par Alstom Transport (avec l’italien Todini et la société algérienne ETRHB pour le génie civil) qui a été choisi pour le construire. Le contrat s’élève à 225 millions d’euros et la mise en service des premières rames interviendra 30 mois après l’entrée en vigueur du contrat, signé en juin.
Sont également prévus 9 km de ligne et 16 stations à Constantine, ainsi que 24 km de ligne et 36 stations à Oran. Les tracés sont actuellement en cours d’élaboration. D’autres agglomérations ont fait part de leur souhait de mettre en place un réseau de tramway, comme Annaba et Sétif, pour lesquelles des études de faisabilité devraient être lancées d’ici à la fin de l’année. La réflexion pourrait aussi être engagée pour Sidi Bel-Abbès, Tlemcen et Tiaret.

En attendant le TGV
Alger attend l’ouverture imminente de son nouvel aéroport, dont la réalisation, relancée en 2003, a été confiée à une société chinoise (voir p. 60). La construction d’ouvrages d’art, notamment de nouveaux ponts et de tunnels, devrait à terme permettre de désengorger la circulation dans l’agglomération, comme la mise à niveau technologique des quatre téléphériques du centre-ville, pour laquelle des appels d’offres ont été lancés. L’électrification de la voie ferrée de banlieue a été confiée à Alstom et les trains de banlieue devront être opérationnels avant la fin du troisième trimestre 2008. Le groupe français doit aussi entamer le programme d’électrification de 300 km de chemin de fer, car l’Algérie a décidé de réhabiliter son réseau ferroviaire, en totale déliquescence depuis vingt ans. Avec un objectif : ouvrir la voie aux trains à grande vitesse (TGV) sur 2 200 km de ligne. Les autorités espèrent qu’en 2012, le trajet Alger-Annaba (629 km) se fera en 6 heures au lieu de 10 heures et 20 minutes actuellement.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires