Ces « hommes en noir »

Publié le 4 juillet 2006 Lecture : 3 minutes.

Comme (presque) tout le monde, j’aime le football et j’en connais les règles. Plus précisément, j’aime le football de haut niveau : celui dont nous régalent depuis près d’un mois les 32 équipes qui ont concouru pour le trophée 2006 de la Coupe du monde.
Je voudrais laisser de côté mes sujets habituels pour vous parler des arbitres de ces matchs, les fameux « hommes en noir » – et de l’arbitrage. Ces « directeurs de jeu », comme on les appelle également, ont été, cette fois encore – mais plus gravement que dans le passé -, mis en accusation : on a dit (et écrit) qu’ils ont « gâché la fête », « inventé des fautes imaginaires » et « fermé les yeux sur d’autres bien réelles ».
Des équipes, africaines ou non africaines – et leurs sélectionneurs – les ont rendus responsables de leur élimination, leur ont fait grief « des cartons jaunes et rouges distribués à tort et à travers », « des buts valables refusés ».

Je suis heureux de constater que le chroniqueur de Jeune Afrique, le très expérimenté Faouzi Mahjoub, n’a pas pris part à ce chur de lamentations. Il s’en est même courageusement dissocié en écrivant :
« Bien que très déçu, Roger Lemerre [entraîneur de l’équipe de Tunisie] n’a pas incriminé l’arbitre, sachant que son équipe a été battue par plus fort qu’elle, sans que l’arbitrage y soit pour rien. [] Les Africains n’ont été désavantagés par l’arbitrage qu’à deux reprises : insuffisant pour expliquer la minceur de leur bilan. »

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Des erreurs d’arbitrage, il y en a, bien sûr, et, parfois, elles sont importantes, gênantes. J’ai entendu cette semaine, de mes oreilles, un arbitre évoquer à la radio, sous forme de mea culpa, le souvenir « d’une main de joueur sur le ballon que tous les spectateurs [et téléspectateurs] ont vue – et qui n’a échappé qu’à [son] regard »
Les arbitres sont des hommes et non des machines : le jeu est de plus en plus rapide et nous, téléspectateurs, le voyons à travers « les yeux » de dix à vingt caméras de télévision placées de tous les côtés du terrain.
Les arbitres, eux, n’ont pas cet avantage et, de surcroît, n’ont qu’une fraction de seconde pour prendre leur décision, et avec la seule aide de leurs deux assistants.
Pour être acceptées, les sanctions qu’ils prennent doivent en outre être fermes ; l’hésitation, le retour en arrière ne leur sont pas permis.
Leur responsabilité est lourde puisque leur jugement n’est susceptible d’aucun appel, sauf exception.

Cela étant, c’est un miracle que les erreurs d’arbitrage ne soient pas plus nombreuses et plus graves que les erreurs judiciaires ou celles que l’on peut relever dans l’article d’un assez bon journaliste.
Comme le juge, l’arbitre cherche la vérité, s’efforce de faire appliquer les règles. Et, comme le journaliste, il est un observateur qui distribue les bons et les mauvais points.
Mais sa tâche est plus difficile que celle du juge et du journaliste : même s’il est près de l’action et s’il est aidé par les deux arbitres assistants, il ne peut pas tout voir.
Compte tenu de ces impératifs et de ces contraintes, c’est une performance du corps arbitral que les décisions de ses membres n’appellent pas plus de critiques fondées et que les erreurs qu’il leur arrive de commettre changent rarement le résultat d’un match.

Plus que tous autres détenteurs du pouvoir de juger et de sanctionner, ils ont droit à l’erreur, et leur corporation, bien que touchée par les maux d’un football qui draine des sommes colossales, reste dans l’ensemble assez intègre.
Comparé aux mondes judiciaire et médiatique, celui des « hommes en noir » s’en tire à son honneur.
Pourvu que ça dure. Et pourvu que la Fifa se décide à les aider à mieux assurer leur difficile mission.

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