À moi Madrid !

Publié le 4 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

Finalement, il n’y aura même pas eu un point d’écart entre les 34,71 % du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et les 33, 84 % du Parti populaire (PP), après le dépouillement de la totalité des bulletins de vote des élections municipales du 25 mai. Le parti du chef du gouvernement espagnol, José María Aznar, ne recule donc que de 0,6 % par rapport à 1999.
Aux élections régionales partielles, convoquées simultanément, le PP a gagné dans 9 des 13 régions qui renouvelaient leur Parlement et dans 35 des 52 capitales provinciales du royaume. Contre vents et marées, José María Aznar a donc tenu ses objectifs. Car au regard des ambitions qui étaient celles des socialistes à la veille du scrutin, leur avance de 200 000 voix sonne un peu comme une défaite. Alors que le léger recul du PP, que l’on croyait au bord de l’implosion après plusieurs mois d’intense mobilisation contre sa politique de soutien à la guerre en Irak, constitue une quasi-victoire. Décidément, sept ans après son élection en 1996, l’énigme Aznar continue. « Comment un personnage aussi pâlot a-t-il pu me battre ? » s’interrogeait déjà Felipe González. Avant d’ajouter : « C’est un défi à la logique. » Une logique qui vient même de rebondir avec l’entrée en politique d’Ana Botella de Aznar, l’épouse de José María. Alors que ce dernier a annoncé qu’il ne serait pas candidat à sa propre succession en 2004, l’irruption sur la scène publique de la deuxième dame (« la première dame, c’est la reine Sofia », précise-t-elle à chaque interview), alimente bien des spéculations. De là à penser qu’Ana Botella constitue le joker que le chef du gouvernement gardait dans sa manche, il n’y a qu’un pas, que certains journaux madrilènes n’ont pas hésité à franchir, en janvier, quand elle a annoncé qu’elle serait candidate, à Madrid, sur la liste du PP conduite par le fringant Alberto Ruiz-Gallardon.
Aussi flamboyante et mondaine que son mari est terne et réservé, cette avocate de formation, mère de trois enfants, n’a, en fait, jamais caché son goût pour la politique. En catholique convaincue, elle a préféré, des années durant, mettre son énergie et son ambition au service de celui dont elle a toujours pensé, en dépit des apparences, qu’il était promis à une belle carrière. En 1979, alors qu’ils sont mariés depuis quatre ans et qu’il n’est encore qu’un obscur inspecteur des finances, c’est elle qui le pousse vers l’Alliance populaire, un parti néo-franquiste que vient de créer l’ancien ministre et intime du général Franco, Manuel Fraga Iribarne. Envoyer un jeune de 26 ans tenter sa chance dans une formation qui ne regroupait alors que de vieux nostalgiques du Caudillo, voilà qui ne manquait pas d’audace. L’idée, en fin de compte, s’est avérée brillante. D’ailleurs le jeune marié y prend vite des responsabilités et, en 1982, il est le candidat du parti dans la province de Soria. Mais José María est battu. Une fois encore, c’est elle qui forcera le destin. Alors qu’il veut abandonner la politique, elle le pousse à tenter sa chance ailleurs. Il obtiendra finalement son siège de parlementaire en se faisant élire, la même année, dans la province d’Avila. La carrière de José María peut commencer. Celle d’Ana Botella peut attendre. Mais les années qui suivent ne sont pas perdues pour autant. Militante active et chevronnée, elle n’a de cesse de faire avancer la carrière politique de son mari. En 1993, elle réussit à le convaincre de se présenter aux élections nationales contre Felipe González. C’est l’échec. Une fois de plus, elle le dissuadera d’abandonner la course à la présidence, et sera doublement récompensée de ses efforts en 1996 et en 2000.
Celle qu’on a longtemps comparée à Hillary Clinton, tant son influence sur son époux était grande, vient enfin de se lancer pour son propre compte. Reste à savoir où elle s’arrêtera. Toujours est-il que l’ampleur et l’importance symbolique de la victoire du PP à Madrid, avec 51,30 % des suffrages, en annoncent généralement une autre aux législatives. Ruiz-Gallardon serait alors placé en situation favorable pour succéder à José María Aznar comme tête de liste du PP au scrutin national de 2004. Il n’aurait plus alors qu’à remettre les clefs de la mairie de Madrid à… Ana Botella. N’a-t-elle pas déclaré qu’elle voulait en faire « la meilleure ville du monde » ? Pour une conseillère municipale chargée des affaires sociales, voilà un projet bien ambitieux ! s

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