L’héritage du marabout

La mort d’un dignitaire religieux désole ses… créanciers.

Publié le 3 juin 2003 Lecture : 1 minute.

Que reste-t-il au créancier quand le débiteur meurt, laissant derrière lui une fortune qui n’est pas à son nom ? C’est la question que se posent, au Sénégal, les spécialistes du droit après la mort du marabout-homme d’affaires Khadim Bousso, poursuivi par la Banque internationale pour le commerce et l’industrie du Sénégal (Bicis), filiale de la BNP (voir J.A.I. nos 2202 et 2210). Évadé de prison depuis le 29 avril, le dignitaire mouride – l’une des principales confréries musulmanes du Sénégal – a connu une fin tragique le 22 mai : il est mort d’une balle dans la tête au moment de son arrestation par des policiers dépêchés de Dakar pour aller le cueillir à Touba, à 200 km de la capitale. Selon toute évidence, il s’est suicidé.
Poursuivi pour banqueroute frauduleuse, Khadim Bousso avait été condamné, en dernière instance, à deux ans de prison ferme. Le contentieux entre lui et la Bicis portait sur 2 milliards de F CFA (environ 3 millions d’euros). Profitant de sa présence au pavillon spécial des détenus dans un hôpital, il avait pris la fuite pour aller se réfugier dans la cité religieuse de Touba, à la recherche de la protection du khalife général des Mourides.
Après moult tergiversations, l’État s’est décidé à le ramener en prison lorsque le clergé de Touba a expressément indiqué qu’il ne le protégeait pas.
Comment, dans ces conditions, la Bicis, peut-elle recouvrer ses créances ? L’action publique pour l’application de la peine étant éteinte de facto, l’action civile, elle, survit au défunt, puisqu’elle intègre son héritage. Problème : Khadim Bousso laisse certes un patrimoine important, mais tous ses biens sont inscrits au nom de tiers, ses enfants et épouses notamment. Or, avise un praticien, on ne saurait juridiquement demander à ses héritiers de payer, sur leurs biens propres, les dettes de leur défunt père. Sauf si ces héritiers acceptent, sans condition, toute la succession. À défaut, ils peuvent faire prévaloir que l’action civile contre Bousso doit porter uniquement sur les biens à son nom.

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