Les grands chantiers du président

Le chef de l’État considère l’éducation et la lutte contre la pauvreté comme les moteurs du développement du pays.

Publié le 3 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

Les dirigeants mauritaniens ne manquent jamais une occasion d’évoquer le grand thème du moment : les chantiers du président. Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya a en effet inscrit à son programme d’actions des priorités importantes pour le pays, tant sur le plan économique que politique : lutte contre la pauvreté, lutte contre l’analphabétisme, et promotion du livre, de la lecture et du savoir.
Un constat sans appel justifie la volonté présidentielle. Près de un Mauritanien sur deux vit avec moins de 1 dollar par jour, le pays est l’un des plus pauvres du continent. En 2001, il a été déclaré éligible à l’initiative de réduction de la dette en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). C’est à ce titre que les bailleurs de fonds internationaux ont épongé 1,1 milliard de dollars, soit la moitié d’une dette équivalant à 226 % du Produit intérieur brut (PIB) en 2001. Seule condition : les quelque 40 millions de dollars du service de la dette économisés chaque année jusqu’en 2011 doivent être alloués à la lutte contre la pauvreté et au renforcement des secteurs de l’éducation et de la santé. En outre, ces mêmes bailleurs de fonds ont manifesté leur volonté d’aider au financement d’un Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP), cadre élaboré par le gouvernement dont l’objectif est de favoriser une croissance annuelle de 6 % à 7 %, en moyenne, d’ici à 2015.
Le CSLP, lancé en 2000, vise à réduire le taux de pauvreté de plus de la moitié en l’espace de quinze ans. Selon les prévisions, celui-ci passerait de 46,3 % en 2001 à 42,3 % en 2004, à 30,7 % en 2010, et à 19,1 % en 2015. Il a pour mission d’étendre dans tout le pays l’accès à des services qui font aujourd’hui cruellement défaut. En 2000, seuls 15 % des ménages disposaient d’une adduction d’eau privée, et 19,4 % avaient l’électricité. À Nouakchott, 70 % de la population s’approvisionne en eau à des bornes-fontaines. Ce qui n’empêche pas 52 % des habitants de devoir en acheter à l’un des cinq mille charretiers que compte la capitale. Pour les pauvres, ces dépenses représentent entre 14 % et 20 % du budget familial. La situation sanitaire n’est pas plus réjouissante : seuls 10 % des quartiers défavorisés sont pourvus d’égouts (chiffre 2000).
En charge de l’application de ce plan de lutte contre la pauvreté, les ministères concernés et une multitude d’agences autonomes. La plus surprenante, dans son approche du problème, est l’Agence d’accès universel (AAU), créée sur suggestion de la Banque mondiale. Une véritable pépinière d’experts mauritaniens y travaillent avec pour priorité l’eau, l’électricité et les télécommunications. « Notre rôle est d’inciter les privés à investir dans la fourniture de ces services, nous explique Mohamed Ould Dié, directeur général de l’Agence. C’est paradoxal, mais pour aider les pauvres, on s’occupe des riches. » Paradoxal mais cohérent, si l’on considère comme l’AAU que la libéralisation de l’économie permet de lutter contre la pauvreté.
Les deux autres chantiers du président Taya ont trait à l’éducation, perçue comme moteur du développement. Dans un discours prononcé à Nouadhibou, le 24 avril, le chef de l’État a rappelé que l’éradication de l’analphabétisme (il touchait 47 % de la population en 2000) reste une priorité absolue. « Le clanisme, le tribalisme, le racisme, la pauvreté, tous ces fléaux et toutes ces tares sont liés à la prévalence de l’analphabétisme », a-t-il souligné.
La troisième idée du président est simple : à l’origine de la pauvreté se trouve l’ignorance. À travers la lecture, on peut apprendre à créer des richesses et renforcer la bonne gouvernance du pays. Il faut donc généraliser l’éducation, ne plus la réserver à une élite. Depuis l’an dernier, Ould Taya fait campagne pour la promotion du livre et de la lecture autour du slogan « Le savoir pour tous ». En 2003, 1,2 milliard d’ouguiyas (5,3 millions d’euros) seront alloués aux bibliothèques scolaires et communales qui sont en train de proliférer (l’objectif est d’en ouvrir un millier). Cette politique a déjà permis à l’État d’acheter plus d’un million de livres, sans compter les contributions des particuliers, pécuniaires ou sous forme de livres et d’équipements divers. À Nouadhibou, le président Taya a par ailleurs annoncé son intention de créer une maison d’édition. s

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires