La route de l’espoir

L’axe Nouakchott-Nouadhibou aura des répercussions considérables sur l’économie.

Publié le 3 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

S’il est, en Mauritanie, un facteur d’intégration nationale, c’est bien celui de la conquête du territoire. L’immensité du pays (plus de 1 million de km2, dont 90 % de surface désertique) a longtemps pénalisé, d’un point de vue commercial, une nation dont les cités sont parfois très éloignées les unes des autres. Séparée de la capitale, Nouakchott, par un no man’s land de quelque 470 km, la région côtière de Nouadhibou, au Nord, a ainsi de tout temps souffert de son exclusion du tissu routier national. Pour relier les deux plus grandes villes du pays, il n’existe aujourd’hui que deux solutions : l’une est onéreuse (l’avion), et l’autre aléatoire (des pistes en plein désert ou, à marée basse, le long de la côte). Résultat : le trajet peut prendre une journée entière. Cela ne sera plus un désagrément grâce à la nouvelle « Transmauritanienne », qui va bientôt voir le jour. Chaînon manquant de la Transsaharienne reliant Tanger, au nord du Maroc, à Dakar, au Sénégal, cette nouvelle route se déploiera tout le long de la côte atlantique d’ici à la fin 2004.
Les relations entre la Mauritanie et ses deux voisins (le Maroc et le Sénégal) se sont, ces dernières années, considérablement réchauffées. Aussi l’idée d’un axe goudronné reliant Tanger à Dakar s’est-elle tout naturellement imposée aux trois pays. Le début de la construction de la partie mauritanienne – déjà envisagée par Nouakchott dans les années quatre-vingt – a finalement été inauguré, le 29 juillet 2002, par le président Maaouiya Ould Taya. Durée prévue des travaux : pas moins de deux ans. L’aménagement de ce tronçon constitue en effet un véritable défi à la nature. Le tracé emprunte tout au long un chemin tantôt caillouteux, tantôt sablonneux, difficile à maîtriser. Il doit par ailleurs contourner le Parc national du banc d’Arguin, cette immense réserve naturelle peuplée d’oiseaux migrateurs, de tortues marines et de dauphins classée au patrimoine mondial de l’Unesco.
Les quelque 70 millions de dollars nécessaires à la réalisation de cette entreprise ont été fournis par le Fonds arabe pour le développement économique et social (Fades), pour l’essentiel (52 millions de dollars), la Banque islamique de développement (BID) et l’État mauritanien (9 millions de dollars chacun). Le Maroc avait, au préalable, financé à hauteur de 3 millions de dollars l’intégralité des études techniques. Quatre sociétés se partagent la construction des 470 km du chantier. Deux entreprises égyptiennes obtiennent la plus grosse part du marché : Arab Contractors (6 milliards d’ouguiyas, soit environ 23,5 millions de dollars) et GNC Desert Road (4,77 milliards d’ouguiyas). Viennent ensuite le consortium sino-mauritanien Agrineq-ATTM (4,37 milliards d’ouguiyas) et le tunisien Bouzguenda (3,85 milliards d’ouguiyas).
La route aura des répercussions considérables sur l’économie du pays, du fait notamment du désenclavement de la région Nord, actuellement peu intégrée dans les échanges commerciaux nationaux. Les entreprises locales, qui pourront ainsi acheminer leurs produits vers le reste du pays, trouveront de nouveaux débouchés. Les nombreuses zones de pêche artisanale de la très poissonneuse côte septentrionale en seront les premières bénéficiaires. L’axe favorisera également le développement du potentiel touristique du Nord, jusqu’à présent trop isolé pour être convenablement exploité. Il permettra notamment de rendre plus accessible le Parc national du banc d’Arguin. À l’heure du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad), la route favorisera enfin une véritable intégration régionale de la Mauritanie, qui faisait jusque-là cruellement défaut à l’économie nationale. Et cela aussi bien avec le Maghreb, au Nord, qu’avec l’Afrique subsaharienne, au Sud. Premier signe fort de cette intégration : la réouverture, en mars 2002, de la frontière avec le Maroc, fermée durant vingt-trois ans.

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