Inga 3 : la RD Congo dit merci à Pretoria

L’Afrique du Sud compte acheter la moitié de la production électrique du futur barrage Inga III, en RD Congo. Du coup, le projet, enfin crédible, pourrait être lancé en 2015.

La centrale Inga I sur le fleuve Congo. © Marlène Rabaud/Reuters

La centrale Inga I sur le fleuve Congo. © Marlène Rabaud/Reuters

ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 28 janvier 2014 Lecture : 3 minutes.

Enfin, Kinshasa n’est plus seul à croire au Grand Inga. Ratifié par les Parlements des deux pays, le traité de coopération énergétique entre la RD Congo et l’Afrique du Sud a été signé le 29 octobre 2013 en présence du président Joseph Kabila et de son homologue sud-africain, Jacob Zuma, en visite d’État. Une étape cruciale dans la construction d’une nouvelle série de barrages près de l’embouchure du fleuve Congo, dans la province du Bas-Congo.

42 000 mégawatts

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Cet accord donne à Pretoria la priorité sur l’achat d’un tiers de la colossale production électrique potentielle du site. D’après une étude franco-américaine (menée par EDF et Aecom), une fois achevé, Grand Inga disposerait d’une puissance d’au moins 42 000 mégawatts (MW). Soit presque deux fois plus que celle du barrage chinois des Trois-Gorges (jusqu’à présent le plus important au monde), et la moitié de la capacité actuelle du continent. De quoi alimenter la RD Congo, l’Afrique du Sud et l’Égypte réunies… dans quelques décennies.

JA2767p086 infoÀ moyen terme, c’est sur la première tranche du projet, Inga III, que se concentre le traité. Des 4 800 MW que générera le futur complexe hydroélectrique, Pretoria devrait en acquérir la moitié (2 500 MW). Le reste serait réservé à la RD Congo (où le taux d’accès à l’électricité n’est que de 9 %), dont 1 300 MW pour l’industrie minière du Katanga, qui accuse un déficit énergétique de 400 MW environ.

Pour acheminer l’électricité jusqu’en Afrique du Sud, le projet prévoit la construction d’une ligne à haute tension de plus de 3 000 km, qui traversera le sud de la RD Congo, la Zambie et le Zimbabwe, pour un coût estimé à 2,3 milliards de dollars (près de 1,7 milliard d’euros).

L’Afrique du Sud a changé la donne

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Bien plus que l’intérêt suscité chez les voisins d’Afrique centrale, l’arrivée parmi les clients potentiels de la très solvable Afrique du Sud a changé la donne. Ce partenariat donne en effet au projet la crédibilité qui lui faisait défaut, notamment depuis les déconvenues subies avec les barrages Inga I et II, inaugurés en 1972 et 1982.

À l’époque de leur construction, sous Mobutu, le pays tablait sur une croissance importante de sa consommation énergétique, notamment en raison d’une forte demande de la part de l’industrie minière du Katanga. Or ces prévisions ne se sont pas confirmées et les deux ouvrages se sont révélés surdimensionnés.

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Le déficit de consommation, associé à la mauvaise gestion de l’État, n’a pas permis de dégager les ressources nécessaires à leur maintenance (lire l’encadré). Mais avec l’arrivée du partenaire sud-africain, les bailleurs de fonds sont désormais prêts à financer en partie Inga III. Le 20 novembre, la Banque africaine de développement (BAD) a ainsi approuvé le déblocage de 68 millions de dollars.

Relativement optimiste

La première pierre devrait être posée en octobre 2015, pour une livraison à l’horizon 2020, selon un calendrier que l’ont reconnaît être « relativement optimiste » à Kinshasa. Car beaucoup de choses doivent encore être réglées, à commencer par le choix des sociétés auxquelles seront confiées la construction du barrage (coût estimé : 4,8 milliards d’euros) puis sa gestion. Trois candidats sont en lice : le chinois Three Gorges Corporation, le consortium formé par les coréens Daewoo et Posco avec le canadien SNC-Lavalin, ainsi que les espagnols ACS, Eurofinsa et AEE.

Kinshasa et Pretoria devront aussi s’entendre sur le prix d’achat de l’électricité, qui doit être négocié courant 2014. « Nous nous sommes déjà mis d’accord sur trois des conditions que ce tarif devra remplir : permettre l’entretien des installations, générer un minimum de ressources en RD Congo et être avantageux pour les Sud-Africains, explique une source gouvernementale congolaise. Ce prix ne sera peut-être pas tout à fait optimal pour nous, mais nous devons être conciliants vis-à-vis de nos partenaires… C’est une étape vers le Grand Inga. »

En attendant, la tension monte

Alors que les barrages Inga I et II disposent d’un potentiel total de 1 750 MW, leur capacité réelle ne s’élève aujourd’hui qu’à 1 100 MW en période de pointe. Après des années de mauvaise gestion et de manque d’entretien, trois des huit turbines d’Inga II, le plus puissant des deux complexes, sont à l’arrêt ; et sur les cinq qui fonctionnent, une seule tourne à plein régime. Leur remise à niveau est cependant en cours.

Quelque 300 MW ont déjà été « récupérés » depuis le début du chantier, en mai 2012, et la capacité devrait continuer à augmenter jusqu’à atteindre le potentiel prévu à l’origine. Sans oublier la construction, sur d’autres sites, de plusieurs centrales, dont celles de Zongo II (150 MW) dans le Bas-Congo, de Katende (62 MW) dans le Kasaï-Occidental, et de Kakobola (10,5 MW) dans le Bandundu. De quoi patienter jusqu’à la mise en service d’Inga III.

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