La RD Congo mise sur les parcs agro-industriels
Un vaste territoire, un fort potentiel… mais une production en berne. Pour redynamiser le secteur, les autorités de la RD Congo misent sur la création de parcs agro-industriels.
Véritable pilier de l’économie congolaise, l’agriculture contribue pour près de 40 % au PIB, contre 15 % pour le secteur minier. Avec 80 millions d’hectares de terres arables et une communauté agropastorale de 14 millions de ménages, son potentiel est énorme… pour une production qui a dramatiquement régressé ces dernières décennies dans toutes les filières, jusqu’à devenir ridicule au regard des besoins du pays.
Résultat : la RD Congo a importé pour plus de 1,2 milliard de dollars (environ 900 millions d’euros) de denrées alimentaires en 2012 ; la facture est estimée à 1,3 milliard pour 2013 et devrait atteindre 1,5 milliard cette année, selon les prévisions du gouvernement.
Plan national d’investissement agricole
La sous-utilisation de ce potentiel agricole constitue à la fois un immense gaspillage et un gigantesque réservoir de croissance. S’il se donne les moyens de ne plus laisser péricliter le secteur et mise sur ses atouts pour le faire redécoller, le pays pourrait subvenir à ses besoins, mais aussi toucher les marchés régionaux et internationaux. L’État a fait ses comptes. En mai dernier, il a adopté le Plan national d’investissement agricole (PNIA) 2013-2020, dont l’objectif est double : sortir les populations de l’insécurité alimentaire et faire du développement des filières agricoles et agro-industrielles l’un des principaux piliers de la croissance.
« C’est là que nous pouvons avoir les retombées les plus importantes sur la population », a souligné le Premier ministre, Augustin Matata Ponyo, début octobre à Chicago, lors du sommet d’affaires du Corporate Council on Africa (CCA, l’organisme américain chargé de développer les échanges avec le continent). Si le secteur agricole enregistre une croissance moyenne de 6% à partir de 2014, la RD Congo pourrait réduire de moitié son taux de pauvreté, atteignant ainsi l’un des Objectifs du millénaire pour le développement, d’ici à 2025 (au lieu de 2015, échéance prévue par les Nations unies).
Investisseurs privés
Afin de mobiliser les investisseurs, en particulier privés, le gouvernement a organisé en novembre à Kinshasa un forum sur le financement du PNIA 2013-2020. Ce dernier requiert un budget total de 5,7 milliards de dollars sur sept ans (voir tableau). Plus de 2 milliards sont déjà financés et en grande partie affectés au volet principal du plan : la mise en valeur des filières agricoles et agro-industrielles. Lors de la rencontre de novembre, près de 1 milliard de dollars d’engagements supplémentaires ont été pris par les entrepreneurs congolais et étrangers, ainsi que par les bailleurs de fonds.
Coup de pouce aux rendements
Triomf DRC, coentreprise créée en octobre 2013 par la société sud-africaine Triomf Fertilizer (70 % des parts) et l’État congolais (30 %), sera opérationnelle en juin prochain et prendra ses quartiers à Boma, dans le Bas-Congo (Ouest), où elle construira une unité de production d’engrais. Un investissement estimé à 39 millions de dollars (plus de 28 millions d’euros).
L’usine, qui exploitera les gisements de phosphate de la province, devrait entrer en activité dans le courant de 2015. Sa production permettra de réduire le coût des engrais – et, donc, des produits agricoles – en RD Congo, d’améliorer la qualité des cultures et leur rendement. Un atout supplémentaire pour endiguer l’insécurité alimentaire.
Pierre angulaire du PNIA : le développement de seize parcs agro-industriels sur plusieurs dizaines de milliers d’hectares à travers le pays. Pour chacun de ces sites, dont les emplacements ont déjà été identifiés, il s’agit de définir les productions, trouver les financements et mettre en relation l’État, propriétaire du foncier, les coopératives, les communautés locales et les opérateurs privés.
Chaque parc devrait être doté d’un statut de zone économique spéciale (ZES) et géré par une société mixte (publique-privée). L’exploitation serait octroyée sous la forme de baux d’une durée minimale de dix ans, en veillant à une répartition équitable entre les terres destinées à l’exploitation commerciale et les terres communautaires.
Accès aux infrastructures
« Nous avons procédé à des études préliminaires, notamment à une analyse des sols pour vérifier leur potentiel et déterminer les types de cultures à y développer, en veillant à la diversité des productions. Ces parcs, qui donneront accès aux intrants agricoles et combineront laboratoire, structures de formation, espaces de stockage, centres de santé, faciliteront en outre l’accès aux infrastructures de transport et à l’énergie grâce à un important volet de réhabilitation et de construction », explique John Mususa Ulimwengu, le principal conseiller du Premier ministre pour les questions agricoles.
Premier projet à l’étude : celui de Bukangalonzo, sur les plateaux batékés, dans la province à forte vocation agropastorale du Bandundu (voisine de celle de Kinshasa). En novembre, la société sud-africaine Agri Africa a commencé à élaborer un plan d’action pour remettre le site en production dans le courant de cette année 2014.
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