Margaret Thatcher devient Premier ministre

Publié le 4 mai 2004 Lecture : 3 minutes.

Au fond, les Britanniques ne sont pas mécontents. Être les premiers en Europe occidentale à choisir une femme comme Premier ministre et avoir ainsi, avec la reine, deux femmes pour diriger le pays, voilà qui prouve leur ouverture d’esprit et les vertus de leur démocratie, une des plus vieilles du monde. Ils sont pourtant un peu surpris. Non que ce jeudi 3 mai 1979 la victoire des conservateurs aux élections législatives britanniques les étonne. Les sondages l’avaient prévue. Moins ample qu’annoncée, elle est pourtant confortable : la majorité recueillie est même la plus importante obtenue par un chef de gouvernement depuis 1950. C’est dire si la gestion des travaillistes a déçu. Que reprochait-on au Premier ministre sortant, James Callaghan, dont le Cabinet a été mis en minorité, ce qui a entraîné une nouvelle consultation ? Surtout, de ne pas avoir su régler les grandes grèves de l’hiver précédent, qui avaient paralysé le pays, et de s’être montré trop complaisant vis-à-vis des organisations syndicales.
C’est une critique qui ne pourra être adressée à Margaret Thatcher, née cinquante-quatre ans plus tôt. Les journaux populaires de Londres l’appellent « Maggie » et les Soviétiques la qualifient de « Dame de fer » – les deux surnoms lui resteront. Car Mme Thatcher n’a jamais caché ses idées : elle trouve la puissance syndicale trop forte et a l’ambition de la réduire ; elle préconise de privatiser nombre d’entreprises publiques ; elle veut baisser les impôts directs ; elle a la volonté de diminuer le poids des dépenses publiques ; partisane des lois du marché, elle s’oppose au socialisme sous toutes ses formes. Bref, elle incarne le libéralisme le plus affirmé et se refuse à mettre son drapeau dans sa poche. Mais elle n’entend pas pour autant se presser : sa large majorité lui permet de prendre son temps et de gouverner pendant cinq ans sans états d’âme. Sa tâche sera difficile, elle le sait. Il lui faudra se bagarrer. Cela tombe bien. Elle aime ça.
D’ailleurs, elle connaît depuis longtemps la nécessité de lutter. Née en province, dans un milieu modeste, presque austère, elle s’est battue pour poursuivre des études, encouragée par son père, épicier de métier, méthodiste strict de conviction. Bénéficiant de bourses scolaires, elle est si travailleuse qu’elle parvient à intégrer Oxford. Là, d’un côté, elle se méfie de l’élite qu’elle y rencontre, élite « née pour diriger », qui appartient, par le milieu social ou la fortune, à la classe des privilégiés. De l’autre, elle est passionnée par les thèses du libéralisme économique. Au point, dès Oxford, de militer au sein de l’Association des étudiants conservateurs. De là date son engagement. Il ne variera pas. Et si elle devient avocate, spécialiste du droit fiscal, elle mène en même temps une carrière politique, se présentant à des élections, pour la première fois, à 25 ans. Elle échouera deux fois avant d’être, à 34 ans, en 1959, députée d’une banlieue cossue de Londres, qui deviendra son fief.

Élue, elle se fait connaître, elle s’affirme et, en 1970, elle est nommée ministre de l’Éducation au sein du Cabinet d’Edward Heath. Ce qui ne l’empêchera pas de combattre celui-ci lorsque les conservateurs, défaits aux élections, décident de se choisir un nouveau chef en 1975. Énergique, volontaire, sincère, elle livre alors sa première grande bataille politique. Elle vainc Heath, installe son pouvoir au sein du parti, devient le leader de l’opposition. Cette fonction officielle est l’antichambre obligatoire de poste de Premier ministre pour peu que les électeurs le veuillent. C’est chose faite quatre ans plus tard, le 5 mai 1979. Jusque-là, c’était surtout la Grande-Bretagne qui connaissait Margaret Thatcher. Désormais, l’Europe et le monde vont entendre parler d’elle.

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