La revanche de Biyouna

Longtemps indésirable à la télévision algérienne, l’héroïne de Viva Laldjérie, le dernier film de Nadir Moknèche, fait son grand retour, cet été, sur le petit écran.

Publié le 4 mai 2004 Lecture : 2 minutes.

Certains la comparent à Marisa Paredes dans Talons Aiguilles, de Pedro Almodóvar. D’autres à Jacqueline Maillant ou à Mélina Mercouri. Née en 1952 dans le très populaire quartier de Belcourt, à Alger, la petite Biyouna – née Baya – se passionne très jeune pour la musique. D’abord à travers sa soeur aînée, la chanteuse Fayza Djazaïria. Puis en regardant l’Égyptienne Samia Gamal à la télévision. À l’âge où beaucoup de jeunes filles apprennent à faire le couscous, l’adolescente, seule devant son miroir, s’entraîne, des heures durant, à la danse « orientale ». Avec des chaussettes roulées en boule dans son soutien-gorge… Devenue adulte, elle multiplie les tournées et les galas à travers l’Algérie, se produit dans les plus célèbres cabarets de la capitale : le Copacabana, la Koutoubia, le Corsaire… Bientôt, on la découvre à la télévision et au cinéma. Mais son heure de gloire n’a pas encore sonné.

Trop « popu » pour les intellectuels du régime, Biyouna irrite par son franc-parler et son humour corrosif. En 1984, elle dénonce vertement le nouveau Code de la famille, ce texte de loi écrit par des hommes, pour les hommes, qui réduit la femme au rôle de « poule » tout juste bonne à « pondre des oeufs ». La montée de l’islamisme ne l’incite pas à se taire. Au contraire, elle lui fournit le thème principal des one-woman shows qu’elle donne dans les plus grands stades du pays. Pas une fois, malgré les menaces des terroristes, elle ne songera à quitter l’Algérie. Elle devra certes se résoudre à se réfugier chez sa belle-famille, à Oran, mais pas pour longtemps : elle est vite de retour à Alger. En 1999, Nadir Moknèche lui propose le rôle de Myriem dans Le Harem de madame Osmane. Biyouna quitte l’Algérie pour la première fois.
En France, elle enregistre un album de chansons (Raid Zone), donne des concerts et collabore à L’Opéra d’Casbah, le spectacle de Fellag mis en scène par Jérôme Savary à l’Opéra-Comique. Pourtant, en dépit de sa participation à une sitcom à succès, la télévision algérienne continue de la bouder. « Je suis allée voir le directeur de production, raconte Biyouna. D’abord, il m’a reproché de trop parler en français, alors qu’en fait je parle « à l’algéroise ». Après avoir lu mes sketches, il m’a dit que s’ils faisaient rire sa fille, il les prendrait. J’en ai pleuré. »

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Car Biyouna continue de déranger. À la télévision comme au théâtre, où elle s’essaie, en 2002. Sous la direction de Fouzia Aït Lhadj, elle joue le rôle principal du Diplomate de Tchekhov. « Nous avons fait salle comble, se souvient-elle, mais cela n’a pas empêché les mauvaises langues de me surnommer « l’illettrée » ou « la médiocre ». Je n’ai jamais fait d’école de théâtre, ma seule arme, c’est mon public. »
Nullement découragée par les critiques, elle frappe à la porte d’Habib Hamraoui Chaouki, le directeur général de l’ENTV, qui l’accueille à bras ouverts. « Il m’a appelée son « rayon de soleil » », raconte Biyouna. Elle signe alors deux contrats. Le premier pour la suite de la sitcom qui a tant contribué à sa popularité : Ness Mleh City – qu’on pourrait traduire par « la cité des gens biens ». Le second pour un divertissement estival au titre de circonstance – Coup de soleil – qu’on verra dans quelques mois sur le petit écran. La chanteuse-danseuse-comédienne-humoriste y sera également animatrice.

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