Vive la « Chindia » !

Publié le 3 avril 2006 Lecture : 3 minutes.

On ne fait pas assez de cas de l’impact économique du tandem Chine-Inde. Leur potentiel en termes d’achat de biens de consommation pour les classes moyennes et de dépenses d’infrastructures est énorme. La Chine, qui compte 1,3 milliard d’habitants, n’a acheté que 5 millions de voitures en 2004. La France, dont la population n’est même pas le vingtième de celle de la Chine, en a acheté la moitié.
Au total, la Chine et l’Inde devraient consacrer plus de 2 000 milliards de dollars à leurs infrastructures au cours des quinze prochaines années, qu’il s’agisse de routes, d’aéroports ou de barrages. Les perspectives vont encore au-delà de ce que la plupart des gens imaginent.
Certes, les deux pays devront surmonter de très graves difficultés pour relever le défi. Parmi les facteurs qui pourraient compromettre leurs prévisions de croissance, on citera le sous-emploi, l’insuffisance des infrastructures et des ressources naturelles, les problèmes d’environnement, une réglementation étouffante et un système bancaire sous-développé. En Chine, la politique de l’enfant unique a causé le vieillissement de la population le plus rapide du monde – ce qui pose un problème budgétaire inextricable pour le financement des dépenses sociales.

Autre défi : stimuler la dépense interne. Les 9 % de croissance annuelle enregistrés par la Chine depuis vingt-cinq ans sont largement dus au boom des exportations. Mais on ne saurait compter sur la seule demande externe pour soutenir indéfiniment l’économie chinoise, surtout si la consommation américaine devait chuter. Quant à l’Inde, son déficit public au sens large s’élève à environ 9 % de son PIB, et l’investissement direct étranger représente à peine le dixième de celui dont bénéficie la Chine. Même si les obstacles à franchir les retardent temporairement, la tendance à la croissance sur le long terme de ces économies émergentes est indiscutable. Venons-en aux pessimistes qui voient dans le réveil de la Chine et de l’Inde une menace pour l’Occident. Tout jugement en ce domaine est fragilisé par l’illusion des droits acquis. Il s’agit là d’une maladie insidieuse qui affaiblit les économies les plus robustes et mine leur compétitivité. Les droits acquis ne se limitent pas aux seules retraites et à l’assurance-maladie, mais concernent aussi l’emploi et cette idée qu’on peut rester inactif pendant de longues périodes sans cesser d’être payé. Dans l’industrie automobile américaine, le corset des contrats de travail et la médiocrité des modèles offerts ont fait disparaître des milliers d’emplois et partir en fumée des milliards de dollars de capitalisation. L’Histoire montre que, pour les individus, comme pour les entreprises et les États, l’invocation des droits acquis conduit à la stagnation et au protectionnisme et finit par saper les atouts qui les ont initialement rendus possibles.

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Au lieu de redouter les avances de la Chine et de l’Inde, nous devrions plutôt nous en féliciter. Le développement économique de ces éléphants devrait conduire à plus de liberté, de démocratie et de stabilité dans le monde et contribuer à une croissance plus forte. Qu’on imagine seulement ce qui nous attendrait si 2,4 milliards d’habitants de notre planète se retrouvaient sans avenir économique ! Oui, nous devons être attentifs au sort des individus pris dans les turbulences de ces transitions globales. Mais si nous, les pays développés, voulons éviter notre propre déclin et tirer tout le parti possible du potentiel des marchés émergents, nous devons nous souvenir des catalyseurs de notre propre succès : l’instruction, l’innovation, la prise en charge des individus par eux-mêmes et l’ouverture des marchés. Et nous devons résister aux sirènes des droits acquis et du protectionnisme.

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