1927-2003 : une épopée pétrolière

Publié le 4 mars 2003 Lecture : 3 minutes.

L’ère pétrolière de l’Irak commence en octobre 1927 avec la découverte par les Britanniques d’importants gisements dans la région de Kirkouk, au nord-est du pays. En quelques semaines, la production atteint 30 000 barils/jour (b/j), puis augmente sensiblement avec la mise en exploitation de nouveaux champs autour de Mossoul. L’évacuation du pétrole se révélant délicate, la production stagne jusqu’en 1947 autour de 80 000 b/j. Il faudra attendre les années cinquante pour que le pétrole irakien prenne son véritable essor. Boycottant le brut en provenance d’Iran après la nationalisation de leurs filiales dans ce pays, en 1951, les compagnies internationales encouragent l’Irak à produire davantage : du coup, la barre des 800 000 b/j est rapidement atteinte. Dans les années soixante, les champs pétrolifères du Nord s’étendent et de nouvelles découvertes sont faites en Basse-Mésopotamie, à proximité du Golfe : la production s’envole jusqu’à 2 millions de b/j. L’Irak s’impose désormais comme l’un des principaux fournisseurs d’un marché mondial en pleine expansion. En octobre 1960, lors de la Conférence de Bagdad, il compte parmi les membres fondateurs, avec l’Iran, le Koweït, l’Arabie saoudite et le Venezuela, de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).
L’arrivée au pouvoir du parti Baas se traduit par une vague de nationalisations. En 1972, l’Iraq Petroleum Company (IPC), qui détenait le monopole de l’exploitation pétrolière dans le pays depuis 1928, cesse d’exister. La décennie soixante-dix est marquée par une brusque augmentation des cours, conséquence de la guerre israélo-arabe de 1973, et par un spectaculaire développement de l’Irak (infrastructures, éducation, santé, industrie). En dépit de sa brutalité, le régime baasiste fait figure de modèle aux yeux des Occidentaux. En 1979, la production culmine à près de 3,5 millions de b/j.
Mais les différents conflits dans lesquels l’Irak de Saddam Hussein va se trouver engagé dans les années suivantes vont tout remettre en cause. En 1980, après l’entrée en guerre contre l’Iran, la production tombe à 2,5 millions de b/j, puis à 1 million de b/j. En 1989, un an après le retour de la paix, elle remonte à 2,9 millions de b/j, puis à 3,5 millions de b/j en juillet 1990, avant de s’effondrer à nouveau après l’invasion du Koweït : 300 000 b/j. Soumis à un strict embargo après sa défaite dans la guerre du Golfe, l’Irak ne produit plus que 600 000 b/j jusqu’en 1996, date de la mise en oeuvre du programme « pétrole contre nourriture », qui permet au pays d’exporter à nouveau une partie de sa production.
Depuis, l’Irak a produit chaque année environ 2,5 millions de b/j, sauf en 2002, où la moyenne est tombée à 1,9 million de b/j, en raison essentiellement du très mauvais état des infrastructures, après deux guerres et plus de dix années de sanctions économiques.
Aujourd’hui, les réserves « identifiées » du pays sont estimées à 112 milliards de barils, auxquels l’Agence internationale de l’énergie (AIE) ajoute quelque 220 milliards de réserves « probables », le pays ayant été peu exploré au cours des deux dernières décennies. Seule l’Arabie saoudite disposerait de réserves plus importantes.
Les compagnies étrangères ne sont évidemment pas indifférentes à cette manne, mais l’embargo en vigueur empêche, pour l’instant, toute exploitation. Pendant les années quatre-vingt-dix, des contacts ont néanmoins eu lieu entre le gouvernement irakien et les compagnies Lukoil (Russie), CNPC (Chine) et TotalFinaElf (France). La totalité du pétrole irakien est aujourd’hui produite par l’Iraq National Oil Company (Inoc), mise en place en 1964.
Selon la plupart des observateurs, la production pourrait rapidement passer à 3,5 millions, voire à 4 millions de b/j. L’Irak devra ensuite investir dans de nouvelles installations pour espérer atteindre les 5 millions ou 6 millions de b/j auxquels il peut raisonnablement prétendre. En dépit de ces investissements lourds (leur montant est estimé à près de 30 milliards de dollars), le brut irakien resterait très compétitif. Selon une étude de l’Arab Petroleum Investments Corporation (Apicorp), chaque baril/jour produit en Irak requiert 10 000 dollars d’investissement, contre 12 000 dollars en Russie et 18 000 dollars en mer du Nord. Un potentiel qui intéresse au plus haut point les Américains, qui s’estiment beaucoup trop dépendants du brut saoudien.

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