« Six pays africains prioritaires pour le Canada »
La ministre de la Coopération internationale, Susan Whelan, définit les grandes orientations de l’aide au développement décidées par Ottawa.
Annoncée lors de la conférence sur le financement du développement, à Monterrey (Mexique), en mars 2002, l’augmentation de l’aide canadienne au développement vient de se concrétiser. Selon le budget présenté le 18 février, la hausse sera de 8 % dès cette année, et ce jusqu’en 2004-2005. En 2001, le montant total de l’aide du pays s’élevait à 2,4 milliards de dollars canadiens (1,5 milliard d’euros). L’augmentation du budget alloué représentera 1,4 milliard de dollars canadiens (867 millions d’euros) d’ici à 2005. La ministre canadienne de la Coopération internationale, Susan Whelan, en explique les enjeux
J.A./L’INTELLIGENT : Quand atteindrez-vous le but que se sont fixé les pays développés de consacrer 0,7 % de leur PIB à l’Aide publique au développement (APD) ?
SUSAN WHELAN : Nous atteindrons l’objectif d’un doublement de notre APD d’ici à 2010. Notre APD a représenté, en 2002, 0,23 % du Produit intérieur brut (PIB) canadien. Cette année, elle devrait passer à 0,26-0,27 %. En 2010, nous devrions en être à 0,35 %. Si l’économie canadienne se porte bien, nous parviendrons tôt ou tard au seuil de 0,7 %. Mais au-delà des chiffres, il faut surtout bien dépenser.
J.A. : D’où la nouvelle stratégie de dépense de l’APD que vous venez de lancer ?
S.W. : Exactement. On nous a souvent reproché notre dispersion. Nous avons donc identifié neuf pays en développement [Bangladesh, Bolivie, Éthiopie, Ghana, Honduras, Mali, Mozambique, Sénégal et Tanzanie, NDLR] avec lesquels nous allons travailler plus particulièrement. Cependant, nous n’allons pas abandonner les autres pays avec lesquels nous collaborions précédemment. Mais, si nous obtenons de nouvelles ressources, nous les consacrerons prioritairement à ces neuf pays, dont six sont en Afrique. D’ailleurs, la moitié de l’augmentation de l’APD qui vient d’être décidée ira à l’Afrique.
J.A. : Sur quels critères ont été sélectionnés ces neuf pays ?
S.W. : Nous avons choisi des pays avec lesquels notre collaboration avait déjà été fructueuse. D’autre part, ce sont des États engagés dans l’amélioration de leur gouvernance et dans une stratégie de réduction de la pauvreté. Nous allons ensuite tenter de cibler, avec eux, deux ou trois secteurs prioritaires.
J.A. : Qu’est-ce qui différencie l’aide directe que vous apportez aux pays en développement et vos engagements vis-à-vis du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) ?
S.W. : Nous sommes pleinement engagés dans le processus du Nepad. Nous avons d’ailleurs mis en place un Fonds canadien pour l’Afrique [doté de 500 millions de dollars canadiens, soit 310 millions d’euros, NDLR], à la suite de l’adoption du Plan d’action pour l’Afrique par les pays du G8 en juin 2002 au sommet de Kananaskis. À cela s’ajoute notre nouvelle stratégie envers ces neuf pays. Mais nous travaillons également sur des projets multilatéraux, avec les institutions internationales, comme la Banque mondiale, par exemple.
J.A. : L’an dernier, le Canada a fait l’objet d’un examen par les pairs du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE. Quels atouts cette expertise a-t-elle fait apparaître ?
S.W. : Nous pouvons nous prévaloir de nos capacités d’expertise tant dans les pays anglophones que dans les pays francophones d’Afrique. L’Agence canadienne de développement international (ACDI) est aussi en train de mettre en place des lignes de conduite pour favoriser l’égalité des sexes dans ses projets, un combat dans lequel nous sommes en pointe. Nous sommes également très compétents dans le domaine de l’agriculture et plus particulièrement de la sécurité alimentaire.
J.A. : Le CAD utilise le système d’examen par les pairs. Le Nepad devrait s’en inspirer pour les pays africains. Deux représentants de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) ont d’ailleurs assisté à votre examen. Qu’en est-il ressorti ?
S.W. : Les deux représentants de la CEA présents ont pu constater à quel point ce mécanisme était utile, même si l’examen par les pairs au sein du Nepad sera compliqué à mettre en place. Et puis, la question du classement des pays sur des critères de gestion globale, de bonne gouvernance… reste problématique pour les pays africains. Ce ne sera pas un processus rapide. Mais il est encourageant de voir que certains pays se sont déjà portés volontaires.
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