Le Baas, ou la Résurrection avortée

Publié le 4 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Saddam Hussein est à la fois président de la République, chef d’état-major des forces armées, président du Conseil de commandement de la Révolution et secrétaire général du parti Baas (« résurrection »), au pouvoir depuis 1968.
Créé en 1947, à Damas, par trois intellectuels, le chrétien orthodoxe Michel Aflak et les musulmans sunnites Zaki Arsouzy et Salaheddine Bitar, le Baas considère les peuples arabes comme une seule nation. Tout en proclamant la laïcité, il met en avant le rôle de l’islam dans la constitution de cette « arabité ». Son programme : retrait des troupes étrangères de tous les pays arabes, proclamation de l’indépendance puis unification, seule solution qui puisse leur permettre de jouer un rôle sur la scène internationale.
Très vite, le Baas inaugure des sections « régionales » en Transjordanie (1948), au Liban (1949), puis en Irak (1951). En 1953, il fusionne avec le Parti socialiste arabe d’Akram Hourani et prend le nom de Baas arabe et socialiste. Son mot d’ordre devient : « Unité, libération, socialisme ».
En 1958, l’échec de la tentative d’unification de la Syrie et de l’Égypte entraîne en son sein une grave crise idéologique.
En 1968, après bien des rebondissements, les baasistes prennent le pouvoir en Syrie et en Irak, à l’issue de deux coups d’État militaires simultanés. Deux directions « régionales » se mettent en place, l’une à Damas, l’autre à Bagdad. De la coalition de civils et de militaires qui prend le pouvoir en Irak, Saddam ne tarde pas à émerger comme l’homme fort. En Syrie, c’est un autre dictateur qui finit par imposer sa poigne de fer : Hafez el-Assad. L’antagonisme entre les deux hommes (et les deux ailes du Baas) ne cessera de s’aggraver au fil des années.
Le Baas abandonne peu à peu son idéologie panarabe et socialiste pour ne garder qu’un vague attachement à la laïcité (comprise comme la non-ingérence des religieux dans les affaires de l’État). Le soutien à la cause palestinienne devient son objectif prioritaire. Avec les résultats que l’on sait…
Le 23 juin 1989, Michel Aflak meurt dans un hôpital parisien. Lorsque sa dépouille est ramenée à Bagdad, où il résidait depuis 1968, Saddam est au premier rang des dignitaires du régime qui portent le cercueil sur leurs épaules. Mais les nouvelles générations ignorent presque tout de ce vieux monsieur de 79 ans et de son combat pour la « résurrection » du monde arabe. La guerre contre l’Iran (1980-1988) à peine achevée, l’Irak s’apprête à occuper le Koweït…
La suite est connue. L’Irak est mis sous embargo onusien (puis sous tutelle internationale), le monde arabe déchiré, et le règlement de la question palestinienne renvoyé aux calendes grecques. Mais Saddam est toujours là. Revenu de ses ambitions panarabistes, il n’a plus qu’une idée en tête : garder le pouvoir. À tout prix. Omniprésent et omnipotent, le parti est un instrument de mobilisation et de contrôle. Ses structures sont calquées sur celles des Partis communistes dans les feues démocraties populaires. Ses cadres et dirigeants jouissent de privilèges exorbitants, les esprits libres et entreprenants en sont écartés. C’est un appareil au service d’un pouvoir absolu et absolument corrompu, celui du Raïs el-Qaïd (« guide-président »).

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires