Sécheresse en Algérie : le plan d’Abdelmadjid Tebboune sera-t-il à la hauteur ?

L’Algérie soigne encore les stigmates du dramatique été 2021 alors qu’une nouvelle sécheresse s’annonce. Si le manque de précipitations aggrave la situation, le gaspillage et le mauvais état des réseaux d’acheminement sont également en cause.

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Publié le 13 mars 2022 Lecture : 3 minutes.

Série Villes et climat. © LEGNAN KOULA/EPA/MAXPPP
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Le spectre de l’infernal été 2021, avec ses mégafeux, ses canicules et sa crise de l’eau, plane de nouveau sur le pays. La saison des pluies tire à sa fin et, de mémoire de vieux paysan kabyle, elle aura rarement été aussi décevante. Pour la deuxième année consécutive, l’Algérie fait face à un déficit pluviométrique record.

« Nous avons eu un mois de novembre exceptionnellement pluvieux mais une saison pluvieuse sèche et les prévisions météorologiques sont très pessimistes. Il ne faut pas s’attendre à beaucoup de pluie à cause d’une mer Méditerranée froide, non pourvoyeuse d’humidité, et d’un flux du sud chaud qui repousse les masses humides et les empêche de rentrer au-delà des côtes du pays. Les prévisions sont donc très sombres. Il faut se préparer à une situation très difficile », déplore Malek Abdesselam, docteur en hydrogéologie et directeur du Laboratoire des eaux de l’université de Tizi-Ouzou.

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Erreurs de gestion et corruption

« Certes, il y a la sécheresse de ces deux dernières années mais nous avons jusque-là très mal géré nos ressources hydriques », estime encore ce scientifique qui décortique les cartes météorologiques et consigne scrupuleusement chaque jour la moindre averse sur le pays.

Le taux de déperdition lié à la vétusté des réseaux peut dépasser 50%

« À la fin de l’année 2019, par la grâce d’une pluviométrie exceptionnelle, tous les barrages étaient pleins à ras bord mais nous avons dilapidé ces précieuses ressources hydriques en tirant, de manière inconsidérée, des quantités d’eau faramineuses des barrages, en distribuant de l’eau 24 jeures sur 24 à travers des réseaux vétustes et fuyards, avec des taux de perdition supérieurs à 50 % », alerte encore Malek Abdesselam.

Selon lui, il convient donc de ne pas tout mettre sur le dos de la nature, l’homme ayant une large part de responsabilité dans cette crise devenue cyclique. « On tirait sur les ressources qui existaient comme si elles n’allaient jamais s’épuiser », poursuit le scientifique qui soutient que les barrages ont joué leur rôle. Celui de suppléer aux défaillances techniques ou de gestion des autres systèmes d’alimentations. En premier lieu, les forages et les usines de dessalement, dont certaines ont plus de quinze ans d’âge. Ils ne peuvent cependant compenser les erreurs de gestion dans un secteur qui n’a guère été épargné par la corruption qui gangrène le pays.

Sur instructions du président Abdelmadjid Tebboune lui-même, un nouveau plan d’urgence de dessalement d’eau de mer a été lancé l’été dernier. Il ambitionne de doter la vingtaine de wilayas qui concentrent l’essentiel de la population du pays de stations de dessalement. Pour notre interlocuteur, cela reste, cependant, un simple effet d’annonce : « C’est une fuite en avant. Beaucoup de projets ne vont pas au-delà de la déclaration d’intention. Les politiques annoncent mais les gestionnaires hésitent à prendre des décisions, car l’acte de gestion a été criminalisé ces deux dernières années. Tout le monde a peur. C’est bien simple, de tout ce qui a été annoncé, rien ne sera prêt pour cet été », tranche cet homme de terrain selon qui il convient de revoir de fond en comble la politique de la gestion de l’eau.

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Il en veut pour exemple ces chiffres fournis très récemment encore sur les besoins en eau réels de la ville d’Alger. « Ils ont été évalués autour de 700 000 mètres cubes par jour mais, dans la réalité, on distribue entre 1,2 à 1, 3 million de mètres cubes jour, soit presque le double des besoins réels », assure-t-il. Une différence qui s’explique par le taux de déperdition lié à la vétusté des réseaux.

Petites solutions

La solution miracle n’existe pas, mais Malek Abdesselam avance que des mesures ciblées peuvent grandement améliorer les choses. « Il est encore possible de capter l’eau des cours d’eau pour les refouler vers les barrages. Nos oueds s’écoulent trop rapidement vers la mer. Il faut mettre des digues pour ralentir l’écoulement des eaux. Cela permet à l’eau de s’infiltrer dans les nappes et donne la possibilité de refouler vers les barrages les plus proches », expose le chercheur, à l’origine de cette idée expérimentée avec succès sur le cours du Sebaou, à Tizi-Ouzou. Comme quoi, si les petits cours d’eau font les grandes rivières, les petites solutions peuvent aider à résoudre les grandes crises.

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