Pillage en bonne et due forme

En vertu d’une convention entrée en vigueur en 1910, les États-Unis pourront exploiter l’or noir irakien « dans le respect de la loi internationale ».

Publié le 4 février 2003 Lecture : 2 minutes.

Les juristes américains ont bien travaillé : ils ont trouvé, selon les révélations du Wall Street Journal du 29 janvier, les fondements légaux permettant aux États-Unis d’exploiter – presque à leur guise – les immenses réserves pétrolières de l’Irak. Ces réserves sont nettement supérieures au chiffre de 112 milliards de barils représentant la situation connue avant 1990, les recherches ayant été suspendues depuis. Même à ce niveau, le sous-sol irakien renferme l’équivalent de cinq années de consommation pétrolière mondiale, contre dix à l’Arabie saoudite. Sans investissements nouveaux et sans tenir compte des destructions éventuelles que causerait la prochaine guerre, l’Irak est capable aujourd’hui de produire près de 2,5 millions de barils par jour (10 % de la production de l’Opep), soit une recette annuelle de 27 milliards de dollars. Une somme sur laquelle le futur occupant militaire ne cracherait sûrement pas !
Le secrétaire d’État Colin Powell a reconnu enfin, selon le quotidien américain, que les États-Unis exploiteront forcément le pétrole irakien et qu’ils le feront dans le respect de la loi internationale et de l’intérêt du peuple irakien tel que compris par le président George W. Bush. « En tant que souverains provisoires du pays, si nous ne contrôlons pas le pétrole, nous ne contrôlerons pas le pays », a déclaré R. Dobie Langenkamp, directeur d’un institut spécialisé sur le droit et l’énergie. Les futurs commandants militaires américains en Irak auront donc toute latitude de gérer les ressources naturelles du pays (eaux, forêts, mines, énergie). Ils pourront même séquestrer le personnel de la compagnie nationale irakienne pour l’obliger à maintenir les gisements en activité. Ils pourront également revoir et annuler les concessions et contrats octroyés par le gouvernement déchu s’ils les estiment contraires à « l’intérêt général du pays ». Ils pourront enfin utiliser une partie de l’argent du pétrole pour financer les frais occasionnés par l’occupation militaire. C’est ce qui se dégage des débats qui ont eu lieu au sein du Pentagone et du département d’État. Les précédents historiques – remontant à 1812, date de l’occupation britannique des… États-Unis – ont été décortiqués. De même que les conventions internationales traitant de la guerre et des butins de guerre. Le texte principal est la Convention n° IV de La Haye de 1907 concernant « les lois et coutumes de guerre sur terre »(*). Entrée en vigueur le 26 janvier 1910, elle autorise l’occupant militaire à exploiter les ressources du pays occupé d’une manière « non dommageable » à long terme. Tout le reste est donc permis.

* Texte de la convention disponible sur Internet : http://www.yale.edu/lawweb/avalon/lawofwar/hague04.htm

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