Côte d’Ivoire : Une ingérence scandaleuse ?

Indignation, suspicions ou approbation : l’intervention de la France dans la crise ivoirienne suscite de nombreuses réactions, le plus souvent hostiles…

Publié le 4 février 2003 Lecture : 7 minutes.

Quelle honte…
Quelle irresponsabilité de la part des hommes politiques ivoiriens, quand on lit en gros titre dans la presse française : « L’avenir de la Côte d’Ivoire se décide dans la banlieue de Paris. » En tant qu’Africain et africaniste, je suis meurtri dans ma chair et dans mon amour-propre. Je rappelle aux hommes politiques ivoiriens amnésiques la fameuse phrase du général de Gaulle : « La France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts. » Je laisse cette citation au goût amer et suave à leur propre appréciation… La solution à la crise ivoirienne viendra des Ivoiriens responsables et soucieux de l’avenir de leur pays, et non des « y voient rien » défenseurs de « l’ivoirité », et qui bradent aujourd’hui leur pays en prônant la désagrégation de la cohésion sociale et la haine tribale.
Moustapha DAHLEB, Lyon, France

Paternalisme choquant
L’idée selon laquelle il fallait agir rapidement fait l’unanimité. Ce qui n’est pas le cas quant aux acteurs et à la manière de gérer les négociations. Tout observateur sérieux reconnaît que l’implication française dans la crise ivoirienne a été teintée de la plus grande ambiguïté. Pourquoi la France d’ailleurs ? Les réponses toutes faites avancent l’idée des « relations historiques », le statut d’« ancienne puissance coloniale ». Argument contradictoire puisque rien ne justifie qu’une « ancienne puissance coloniale » intervienne dans une crise d’ordre interne. D’autres se sont empressés de trouver un fondement juridique dans les accords de défense signés par la Côte d’Ivoire et la France. Or il s’agit d’un problème ivoiro-ivoirien sans rapport avec lesdits accords, valables dans le seul cas d’une menace extérieure pour la sécurité et l’intégrité territoriale. Sinon, pourquoi la France ne pourrait-elle pas envoyer son armée le jour où des étudiants mécontents ou des mouvements syndicaux inquiéteront le pouvoir ivoirien en manifestant massivement ?
Sur le plan purement symbolique, il est assez choquant pour l’Ivoirien moyen d’entendre le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, dire, par exemple : « j’ai demandé aux partis politiques ivoiriens… ». La Côte d’Ivoire serait-elle encore une colonie ? L’attitude paternaliste de la France n’a pas laissé croire qu’on était dans le cadre d’un partenariat entre deux États souverains… Au cours d’une émission télévisée, Villepin a également réaffirmé la volonté de la France de « reprendre sa place » en Afrique. Ne devrait-elle pas plutôt chercher à redéfinir sa politique africaine ? Aujourd’hui, on se contente de clamer des « France is back », une idée fièrement relayée par la presse française depuis le périple africain de Villepin. Cela montre deux facettes d’une même réalité qui maintient le statu quo : l’incapacité des Africains à régler leurs problèmes et le complexe de supériorité hexagonal qui donnent aux Français un sentiment de légitimité à s’immiscer dans les affaires de la Côte d’Ivoire. Pourtant, on aurait pu imaginer des négociations au sein des différentes institutions sous-régionales de l’Afrique de l’Ouest, déployer des forces dans ce même cadre régional, quitte à y associer la France ou d’autres pays. Non pas comme des parrains, mais comme des observateurs, des partenaires.
Claude BAKAMA, Tours, France

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Un engagement exemplaire !
L’engagement de la France en Côte d’Ivoire alimente les passions. Certains y voient quelques relents colonialistes. En effet, pour eux, cette intervention pose la question de la souveraineté ivoirienne et, accessoirement, celle de l’incapacité des Africains à résoudre leurs différends. Pour ma part, je pense que ce débat est inopportun. Nous devons sortir du piège de ce prétendu complexe d’infériorité. La propagande nationaliste constitue une tactique classique et fructueuse pour nos politiques. Au plus fort de la guerre, la France était accusée de néocolonialisme, tantôt par Bouaké, tantôt par Abidjan. C’est ainsi qu’il nous faut en toute lucidité saluer l’intervention française en Côte d’Ivoire. Comme a su bien le dire Dominique de Villepin, la France a permis d’éviter le pire. Décomplexons nos relations avec la France ! Il n’y a aucune honte à être aidé par une « grande soeur » plus puissante. L’engagement du gouvernement actuel est exemplaire, et tranche avec l’indifférence dogmatique des socialistes. Surtout, ces considérations ne doivent pas nous détourner de nos priorités : le développement économique et le sida…
Auxence OSSETE, étudiant, Montmorency, France

Madame Courage
Face au silence complice, voire coupable, de la communauté internationale et de l’Occident, en particulier vis-à-vis du drame palestinien, je voudrais, par ce message, saluer Mme Gretta Duisenberg pour son militantisme affiché pour la cause palestinienne. Madame, nous, les sans-voix, suivons à travers J.A./l’intelligent (voir n° 2192, p. 16) et apprécions hautement votre juste combat afin qu’il soit reconnu au peuple palestien le droit à l’autodétermination. Bravo Madame Courage et aussi à votre époux qui, en dépit de sa haute et délicate mission de président de la Banque centrale européenne, vous apporte son soutien à 100 %. Vive la Palestine libre et indépendante !
SALIFOU ABDOULKADER
Niamey, Niger

Pourquoi cet acharnement sur Gbagbo ?
Monsieur B.B.Y., à plusieurs reprises, vous avez démontré, par vos analyses, votre maîtrise du problème ivoirien. Mais, selon moi, vous faites trop la part belle à Alassane Ouattara et aux rebelles. Comment pouvez-vous préconiser la mise entre parenthèses d’un régime issu d’élections libres – bien que discutables -, parce que des individus ont pris les armes ? Gbagbo est-il plus mal élu que Biya, Bongo, Eyadéma, Compaoré, Déby ou Conté ? Pour quelle raison vous acharnez-vous contre le président ivoirien, alors qu’il n’est en aucun cas responsable de cette crise, déjà latente sous Houphouët et ses successeurs ? Vos conclusions me semblent extrêmement partisanes, souvent en faveur des musulmans ou des pseudogouvernements de droite d’Afrique francophone. Pourtant, concernant la France, j’ai cru comprendre que vous étiez plutôt favorable à la gauche… Mais sachez une chose : les années cinquante, au cours desquelles la France pouvait dicter la politique africaine, sont révolues. Aujourd’hui, seuls les Ivoiriens peuvent savoir ce qui est bon pour eux. Dans aucun de vos numéros, vous n’avez souligné que Ouattara et les musulmans du Nord n’ont jamais été aussi libres que sous le régime Gbagbo : Forum de réconciliation nationale, certificat de nationalité, élections municipales (soixante-six communes sont aux mains du RDR), élections départementales… Depuis que Gbagbo est président, il a organisé trois élections libres et transparentes. Vrai ou faux ? Combien de présidents africains l’ont fait ? Il me semble que les partis ivoiriens parlent d’une même voix, et Chirac, en tant que grand politicien, en tient visiblement compte. Vous serez surpris, je l’espère, par l’issue de cette guerre.
Samba ELESSA, étudiant à l’école polytechnique de Turin, Italie

Cessez vos querelles d’Églises !
À messieurs Talbi, Borrmans et autres : de grâce, arrêtez donc de vous bagarrer à coup d’Évangiles et de versets du Coran (voir J.A.I. n° 2189-2190). Et si Dieu n’existait pas ? Que de temps perdu avec vos élucubrations ! N’avez-vous pas autre chose de plus constructif à faire de vos journées que de discourir toujours sur le même sujet ? Et d’attiser la haine des deux côtés ? Ne croyez-vous pas qu’il existe, dans ce bas monde, des causes plus urgentes, telles la lutte contre la faim et la maladie ? Il n’y a point besoin de Dieux pour cela, mais d’amour et de croyance en l’homme ; les Dieux ne font que vous diviser, depuis la nuit des temps. Ça va durer encore longtemps ? Oui, les chrétiens ont eu tort de mener leurs croisades, oui, d’autres sont intolérants et oppriment leurs femmes… Oubliez donc tout cela et travaillez pour un monde meilleur. Comment peut-on, en 2003, croire et se déchirer de la sorte ?
Bruno HERVOUT
Meschers, France

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Les délires de Compaoré
Au moment où les uns et les autres s’attelaient ardemment à mettre fin à la crise ivoirienne, le président burkinabè s’entêtait à remuer le couteau dans la plaie. Ses déclarations concernant le président ivoirien dans le quotidien Le Parisien du 21 janvier sont de pures divagations. Est-il vraiment bien placé pour donner des leçons de droit et de démocratie à Laurent Gbagbo ? Il existe un tribunal encore plus grand et plus suprême que le Tribunal international de La Haye : c’est le tribunal de Dieu où nous y irons tous. Pensez-y, Monsieur le Président. Mettez donc fin à vos déclarations belliqueuses qui ne font qu’attiser les rancoeurs entre deux peuples frères, qui ont pourtant besoin l’un de l’autre comme les deux bras du corps. L’Afrique d’aujourd’hui n’a que faire de chefs d’État qui n’ont pour ambitions que de semer la zizanie sur un continent qui veut enfin vivre dans l’unité et la paix.
Eric ADOU, Allemagne

« l’intelligent »: quel dommage !
Je tenais à vous faire part de mon admiration pour votre journal et son parcours. J’ai suivi votre évolution depuis le début de mes études scolaires au Maroc, en passant par Dakar où ma famille s’est installée dans les années quatre-vingt, jusqu’à ce jour. Il reste aujourd’hui le symbole de ce que des Africains dynamiques, entrepreneurs et visionnaires (et oui, cela existe) peuvent réussir à force de volonté. Cependant, j’ai assez mal perçu votre changemenent de nom. Aujourd’hui encore, je n’arrive pas à adhérer à cette idée. Car Jeune Afrique faisait notre fierté. Pour beaucoup, je pense, l’intelligent est synonyme de honte : pour ma part, il m’oblige presque à cacher ma lecture en public, pour éviter d’être l’objet de toute sorte de blagues douteuses. Sur le plan des articles, même si Jeune Afrique (désolé mais je ne crois pas que je l’appellerai un jour l’intelligent) me procure encore de bons moments, je le trouve beaucoup moins passionné et passionnant qu’auparavant. Alors qu’à une époque je m’attendais presque chaque semaine à trouver quelque chose de palpitant, un scoop, une enquête, je n’éprouve plus vraiment ce sentiment d’excitation. Par ailleurs, je ne sais pas s’il s’agit simplement d’une impression, mais, et c’est peut-être l’effet l’intelligent, la place accordée à l’Afrique me semble s’être réduite au profit de sujet internationaux, que je peux également lire dans les journaux canadiens… En conclusion, bravo quand même mais, attention : gardez le cap et restez le trublion africain que vous avez toujours été !
FAHIM BERRADA
Montréal, Canada

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