Batam, suite et fin

En application d’un programme global de redressement, les propriétaires du groupe de distribution pourraient se voir exclus du capital.

Publié le 4 février 2003 Lecture : 3 minutes.

Les marchés l’ont baptisé le « coup d’accordéon ». Hela Batam, leader de la distribution dans l’électroménager, et Bonprix, l’un des poids lourds de la distribution alimentaire, devraient faire l’objet d’une telle opération pour assurer leur survie.
Un « coup d’accordéon » consiste à réduire à zéro le capital social pour compenser les pertes du groupe. Une recapitalisation doit s’ensuivre pour assurer le redressement de chacune des deux compagnies.
Telle serait la conséquence de l’application d’un programme global de redressement élaboré dans le cadre de discussions menées par l’administrateur judiciaire du groupe Batam avec les banques et les fournisseurs et qui, selon le Conseil du marché financier, sont « sur le point d’aboutir à un consensus ».
Mises sous administration judiciaire le 5 octobre 2002 en raison des difficultés rencontrées par leurs dirigeants pour rembourser aux banques, aux institutions financières et aux fournisseurs des arriérés d’un montant de 300 millions de dinars environ (212 millions d’euros), les 14 sociétés du groupe (voir J.A.I. n° 2192) sont désormais pratiquement vouées à changer de propriétaires.
Dans le « coup d’accordéon », les actionnaires d’une société en difficulté peuvent, en effet, être exclus par la suppression de leur droit préférentiel à la souscription dans la nouvelle augmentation de capital.
C’est donc une mauvaise nouvelle pour Maher et Taïeb Ben Ayed, fondateurs, principaux actionnaires et patrons du groupe Batam, qui, déjà écartés de la gestion depuis quatre mois, perdraient pratiquement tout ce qu’ils ont investi. Avec les familles alliées, ils détiennent la majorité dans le capital de l’ensemble des sociétés. Un diagnostic datant du 27 janvier établi par les auditeurs (Ahmed Mansour et associés, Deloitte & Touche, AMC Ernst & Young, Cabinet MBZ Grant Thornton) est catégorique : sous leur conduite, les fonds propres de la société Hela Batam « ont été totalement absorbés ».
Mauvaise nouvelle aussi pour un autre grand actionnaire : La Financière Tunisienne (famille de l’homme d’affaires Hédi Djilani), qui détient un peu moins de 40 % dans le capital de Bonprix, 6 % dans Hela Batam et des participations dans plusieurs autres sociétés du groupe.
À moins que leurs intérêts ne soient préservés dans le programme de redressement, c’est une mauvaise nouvelle aussi pour les petits porteurs. Ils détiennent 37 % du capital de Hela Batam, dont l’action, lancée au prix de 23 dinars lors de son introduction en Bourse il y a trois ans, ne valait plus que 2,2 dinars le 27 janvier lorsque sa cotation a été suspendue. « Puisque le capital est ramené à zéro dans le coup d’accordéon, cela veut dire que les actions Batam ne valent plus rien. La radiation du titre Batam de la Bourse de Tunis est maintenant fort probable », estime un analyste boursier.
Le malheur des uns fait le bonheur des autres : pour les éventuels investisseurs, les réseaux de Hela Batam et Bonprix, avec 62 points de vente en électroménager pour le premier et 42 points de vente de biens de consommation pour le second, constituent une affaire en or dans un marché en pleine croissance. Ce qui est pratiquement acquis, c’est que les banques vont convertir une partie des créances en participations dans le capital des deux sociétés. Mais cela ne fait pas du cash, et il faudra donc faire appel à d’autres investisseurs qui apporteront des fonds frais. Aucun nom n’a filtré pour le moment, mais on assure que les candidats potentiels existent. Ceux-ci seront connus une fois le programme de sauvetage que présentera Ali Debaya, l’administrateur judiciaire, sera complètement finalisé dans les semaines à venir et dont le principal mérite sera d’avoir sauvé l’essentiel : les postes d’emploi. Ce plan, d’après des sources proches, entraînerait, outre le coup d’accordéon pour Batam et Bonprix, la cession ou la liquidation des autres sociétés ; la restructuration de la dette bancaire du groupe (la moitié du total) moyennant son échelonnement, la révision de ses conditions ainsi que la concession d’abandons partiels ; le soutien du pool bancaire créancier par l’octroi de nouveaux crédits ; l’accord avec les fournisseurs sur les modalités de remboursement partiel des créances et la reprise de l’approvisionnement du groupe.

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