Ahmadinejad n’est pas fou

Publié le 2 octobre 2006 Lecture : 2 minutes.

L’Iran a le vent en poupe. L’argent du pétrole – 55 milliards de dollars l’an dernier – coule à flots. Ses voisins sont sévèrement affaiblis. En Irak, c’est le chaos ; l’Afghanistan et le Pakistan sont préoccupés par le retour des talibans ; le gouvernement libanais subit une pression terrible ; les États du Golfe sont terrorisés. Mais, plus important encore, les États-Unis peuvent difficilement agir, leur influence et leur poids politique dans la région étant à leur plus bas niveau historique.
Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad est en train de mettre à profit ce contexte pour accentuer son avantage. Il a débordé les régimes arabes sur la question israélo-palestinienne, en en parlant dans des termes plus agressifs que ceux-ci n’avaient osé le faire (par crainte de la réaction de Washington). Comme il sait que les gouvernements sunnites arabes ne l’aiment pas, il a choisi de s’adresser directement à leur opinion. Et c’est en train de marcher.

Ahmadinejad est aussi en train de transformer le programme nucléaire iranien en un motif de fierté pour l’ensemble du Tiers Monde. En profitant de l’antiaméricanisme ambiant, il prétend que les États-Unis sont décidés à empêcher un pays en développement de progresser sur le plan technologique. Là encore, ça marche. Cent dix-huit pays, au moins, ont rallié la cause iranienne pendant le récent Sommet des non-alignés.
Au lieu de s’en effrayer ou de s’en épouvanter, l’Amérique devrait regarder Téhéran avec une juste dose de calme et de confiance. La bonne fortune iranienne ne sera pas éternelle. Les cours du pétrole devraient baisser ; l’Irak va être, d’une manière ou d’une autre, de moins en moins un poids mort dans la zone ; les régimes arabes vont prendre de l’assurance en répondant à l’essor du pouvoir iranien. Washington pourrait aussi prendre une initiative au Liban et en Palestine, ce qui améliorerait largement le climat politique.
En observant Ahmadinejad lors d’un entretien privé l’autre semaine, j’ai été frappé de constater à quel point il est loin de l’image que l’on se fait d’un fou. Il était suffisant, arrogant même, parfois agressif, mais toujours calme et intelligent. Si nous voulons nous montrer plus malins que lui, nous devons utiliser des arguments intelligents et irréfutables. Au lieu de cela, nous avons choisi de menacer, de brutaliser et d’intimider. Il ne faut donc pas s’étonner si Ahmadinejad est en train de gagner la bataille de l’opinion.

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