Nawal el-Moutawakil

Championne olympique du 400 mètres haies en 1984

Publié le 2 août 2004 Lecture : 3 minutes.

Los Angeles, 8 août 1984. En l’espace de 54 secondes, Nawal el-Moutawakil, 22 ans, 1 m 59, entre dans la légende olympique en arrachant la médaille d’or du 400 mètres haies. Cette performance a bouleversé le destin de la jeune athlète marocaine. Vingt ans plus tard, que reste-t-il de cette extraordinaire journée ? « Beaucoup d’émotions. C’était une belle épreuve, une gloire inoubliable pour le Maroc et la femme marocaine, arabe et africaine qui n’avaient jamais atteint un tel niveau d’excellence dans une compétition planétaire comme les jeux Olympiques », se souvient-elle dans son bureau de l’Association marocaine sport et développement (AMSD), à Casablanca.

Les mauvaises langues rappelleront que, ce jour-là, une vingtaine d’athlètes des pays de l’Est brillaient par leur absence, leurs dirigeants ayant décidé de boycotter les Olympiades. Quoi qu’il en soit, celle qui passe pour « la femme d’une seule course » a mis fin à sa carrière sportive cinq ans après son exploit de Los Angeles. Pourquoi la « gazelle de l’Atlas » s’est-elle si tôt retirée de la compétition ? « J’avais atteint le summum. Bien sûr, j’aurais voulu battre le record du monde, mais j’ai souvent eu des pépins de santé. Alors je me suis dit : Nawal, tu es rentrée dans le monde sportif par la grande porte, essaie de sortir la tête haute, plutôt que de courir après des miettes, explique-t-elle. J’ai décidé de militer autrement. En 1984, il y avait un vide au niveau de la pratique sportive féminine, au Maroc comme dans les autres pays africains. J’étais la seule femme qualifiée. Je me suis retrouvée seule dans un milieu masculin. J’ai commencé à me demander où était la seconde moitié de la population ! »
Décidée, la championne range son maillot et entame une carrière d’« ambassadrice du sport » qui la conduira aux quatre coins du monde, de forums internationaux en colloques, mais aussi dans des hôpitaux, des maisons de retraite, des prisons, des usines, des établissements scolaires. Son objectif : transmettre ce qu’elle appelle la « positive mental attitude », état d’esprit typique des États-Unis, où elle a décroché en 1988 un bachelor of sciences.

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Parallèlement, elle se marie, donne naissance à deux enfants et assume des fonctions aussi diverses qu’entraîneur (de Nezha Bidouane) et secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires sociales chargée de la Jeunesse et des Sports (1997-1998). Elle devient ainsi l’une des quatre premières Marocaines à occuper une aussi haute fonction étatique. Par ailleurs, elle intègre une foultitude d’organisations. Impossible de les mentionner toutes, mais citons le Comité international olympique (qui vient de la nommer présidente de la commission d’évaluation des villes candidates à l’organisation des J.O. de 2012), le comité international des jeux Méditerranéens et la Laureus World Sports Academy, dont elle est membre fondateur depuis mai 2000. C’est d’ailleurs dans le cadre de cette instance, où elle côtoie Boris Becker et Nadia Comaneci, qu’a été inauguré, en novembre 2001 à Ait Itkel, un douar de la région de Marrakech, un projet visant à promouvoir l’activité sportive féminine en milieu rural…

En mars 2002, l’ex-championne a créé l’AMSD, dont elle assure la présidence. Cette association apporte son soutien aux jeunes athlètes issus de milieux modestes. Leurs difficultés ne tombent jamais dans l’oreille d’une sourde : « À mes débuts, je n’avais pas un rond et je courais pieds nus », rappelle Nawal, qui voudrait aussi assurer un avenir aux athlètes retraités : « Aouita a souffert de ne pas trouver sa place après la compétition et il a quitté le pays. » Autre activité phare de l’AMSD : une course 100 % féminine dont la sixième édition s’est déroulée en mai dernier et qui regroupe des athlètes de haut niveau et des amatrices qui courent en survêtement ou en djellaba… Et si aujourd’hui les Marocaines sont si nombreuses à marcher ou à jogger le dimanche matin, Nawal el-Moutawakil n’y est sans doute pas pour rien.

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