Proclamation de l’indépendance du Cap-Vert
C’est une grande liesse populaire qui, ce 5 juillet 1975, accueille la proclamation de l’indépendance du Cap-Vert. Les 300 000 habitants des neuf îles de cet archipel large de 4 033 km2, réunis à Cidade da Praia dans la tenue des grandes occasions, brandissent des drapeaux aux nouvelles couleurs nationales. Des chasseurs portugais décollent de l’aéroport de la capitale, lancent des fleurs sur la foule qui chante et danse sur les artères de la ville
Le Cap-Vert fête une liberté retrouvée dans des conditions singulières, sous l’égide du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et des îles du Cap-Vert (PAIGC).
La rencontre de ces deux destins nationaux se noue en 1956, quand Amílcar Cabral, un ingénieur agronome cap-verdien formé à l’université de Lisbonne, fonde le PAIGC. Dès 1959, il s’engage dans la lutte armée contre le colonisateur portugais. Le mouvement prend une orientation nationaliste, révolutionnaire et marxisante après l’assassinat de Cabral à Conakry (Guinée), en janvier 1973. La guérilla connaît des fortunes diverses dans les deux pays. Alors qu’elle contrôle les deux tiers de la Guinée-Bissau, elle reste confinée et clandestine au Cap-Vert.
La révolution des illets au Portugal, en avril 1974, change la donne. Au lendemain de ce bouleversement politique en métropole, les deux États accèdent à l’indépendance. Ils constituent sur le papier une entité commune, mais se dotent toutefois de leurs propres autorités. La première loi cap-verdienne votée à Cidade da Praia prévoit la création d’une future fédération. Le texte institue un « conseil de l’unité » qui doit étudier un « projet de Constitution pour l’association des deux États » à soumettre aux « deux Assemblées souveraines ».
Mais les dirigeants, soucieux de sauvegarder leurs souverainetés respectives, se montrent peu pressés de parvenir au rassemblement. Le rêve de l’union s’estompe lorsque le tout nouveau président du Cap-Vert, Aristides Pereira, déclare que celle-ci « respectera la voie propre et le caractère particulier de chaque État ». Et finit par prendre un siège pour son seul pays à l’Organisation des Nations unies (ONU) et à l’Organisation de l’unité africaine (OUA). Les premières frictions entre les insulaires cap-verdiens et les continentaux bissauguinéens feront le reste. La séparation devient effective au lendemain du coup d’État du 14 novembre 1980, à Bissau.
Secrétaire général du PAIGC, premier président de la République indépendante du Cap-Vert, Pereira prend une orientation nationaliste. En dépit de la situation stratégique de son pays, situé à 400 km de la façade atlantique de Dakar, il demande l’évacuation des deux bases militaires portugaises de Mindelo et Sal. Et déclare : « Ce serait un suicide de notre part de tolérer des bases étrangères sur notre archipel. » Pour protéger celui-ci, il crée les « Forces armées révolutionnaires du peuple », constituées d’anciens guérilleros cap-verdiens du maquis de Guinée-Bissau. Mais également une force paramilitaire de volontaires.
Alors que Pereira lance des slogans révolutionnaires, son Premier ministre, Pedro Pires, sollicite l’aide étrangère, martèle que la vie des trois quarts de ses compatriotes en dépend. L’ancienne puissance coloniale est la première à réagir. Le chef du gouvernement portugais, le général Vasco Gonçalves, qui représente le président Costa Gomes à la célébration de l’indépendance cap-verdienne, ne quittera pas la désormais ex-colonie sans avoir signé un accord général de coopération.
De 1975 à 1990, le Cap-Vert vivra sous un régime de parti unique animé par le PAIGC. Avant de connaître, en 1991, les premières élections législatives pluralistes de sa jeune histoire, remportées par le Mouvement pour la démocratie. Depuis, les alternances paisibles se suivent dans cet archipel devenu un modèle démocratique en Afrique.
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