Poutine for ever ?

Le président pourrait être tenté de briguer sa propre succession en 2008. À moins qu’il sorte de sa chapka un homme de confiance.

Publié le 2 juillet 2007 Lecture : 3 minutes.

Le sévère Vladimir Poutine deviendrait-il facétieux ? On aurait pu le croire, il y a quelques jours, lorsque, en plein sommet du G8, dépité d’être la cible des médias occidentaux, il lança : « La tragédie, c’est que je suis le seul vrai démocrate de la planète. Depuis la mort du mahatma Gandhi, je n’ai personne à qui parler. » Mais davantage que cette blague d’ex-potache kagébiste, ce sont ses propos sibyllins à propos de sa succession, prévue pour mars 2008, qui alimentent les rumeurs. D’ici à cette date, toutes les hypothèses sont permises, mais une chose est sûre : la bataille des clans se poursuit sous les lambris du Kremlin. Sournoisement, mais férocement.

Première question : partira, partira pas ? Poutine, qui, théoriquement, n’a pas le droit de « rempiler » (la Constitution lui interdisant d’exercer plus de deux mandats consécutifs) et qui affirme n’en avoir aucune envie, pourrait être tenté de rester. Et, pour cela, de modifier la Constitution. Sa cote de popularité (60 % des Russes souhaitent qu’il se représente), son appétit du pouvoir et le souci de perpétuer un système qui profite à ses amis, qu’il a propulsés aux manettes des fleurons du secteur énergétique ou du complexe militaro-industriel, pourraient l’inciter à franchir le pas. Mais plus le temps passe, moins cette hypothèse paraît probable : changer la donne au dernier moment, au risque de passer pour aussi peu démocrate qu’un Loukachenko en Biélorussie ou un Nazarbaïev au Kazakhstan, ne serait pas vraiment flatteur pour Poutine, qui se plaît davantage en compagnie de ses homologues du G8 qu’au côté de ces encombrants voisins. À moins que le manque de successeur crédible, voire une crise politique, l’oblige à se sacrifier pour le bien de la Russie !

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Deuxième question, qui découle de la première : si Poutine quitte la présidence en 2008, pourra-t-il la reprendre en 2012 ? Oui, d’après la Constitution, qui autorise un troisième mandat, pourvu qu’il ne suive pas le deuxième. Cela suppose que Poutine adoube un président de transition. Et que ce dernier soit suffisamment effacé pour accepter de jouer ce rôle sans succomber plus tard à l’ivresse du pouvoir. Ce n’est pas gagné !
Poutiniste inconditionnelle, la pétulante Valentina Matvienko, actuelle gouverneure de Saint-Pétersbourg, a déjà proposé ses services. Affaire à suivre, même si l’accession d’une femme à ce poste semble chimérique. Sergueï Ivanov et Dmitri Medvedev, tous deux vice-Premiers ministres et présentés depuis des mois comme les dauphins du « tsar », tiennent toujours la corde. Mais, à défaut de charisme, aucun ne s’est imposé. Ils pourraient « caler » en cours de route (c’est du moins l’avis de 92 % des auditeurs de la radio Écho Moscou) au profit d’un troisième larron. Le nom de Sergueï Narychkine, 52 ans, promu vice-Premier ministre chargé du commerce extérieur en février, est désormais sur toutes les lèvres. Narychkine, qui a connu le président sur les bancs de l’Institut du KGB, avant de le suivre à la mairie de Saint-Pétersbourg, a toute sa confiance. Ou, du moins, celle que l’énigmatique occupant du Kremlin laisse transparaître !
On se souvient qu’en 1999 le président Eltsine avait choisi son successeur au dernier moment, déjouant tous les pronostics : le parfait inconnu qu’il avait tiré de sa chapka était un certain Poutine. Lequel pourrait à son tour être tenté d’user du même stratagème.

Troisième question : Poutine restera-t-il influent ? Telle est bien, en tout cas, son intention. Ce pourrait être à un poste honorifique, même si celui de Premier ministre est doté de pouvoirs limités, à un poste d’arbitre (président de la Cour constitutionnelle ?) ou à celui, stratégique, de président du géant gazier Gazprom. Bien que Poutine ait déclaré qu’il ne se sentait nulle vocation pour les affaires, cette dernière éventualité est très souvent citée.
Reste le scénario rêvé par l’opposition : l’effondrement du système. Pour Gary Kasparov, l’ancien champion d’échecs devenu leader de L’Autre Russie, il suffirait que les Russes découvrent à quel point l’oligarchie poutinienne s’est enrichie en pillant les ressources naturelles du pays pour provoquer une explosion sociale. Encore faudrait-il que les médias soient libres et les manifestations d’opposition tolérées.

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