La Tunisie en haut de gamme

Grâce à l’augmentation du pouvoir d’achat et à la baisse des taxes d’importation, les grosses cylindrées battent des records de ventes.

Publié le 2 juillet 2007 Lecture : 4 minutes.

C’est un événement. Pour sa septième édition, le Salon international de l’automobile de Tunis (Siat) a accueilli, du 20 au 24 juin, trois nouvelles marques, et pas des moindres. Les luxueuses Porsche, Jaguar et Land Rover ont ainsi fait une entrée remarquée. Après Alpha International, qui a annoncé l’acquisition de la licence d’importation de Land Rover, c’est au tour de la société Ennakl (Groupe El Materi) de créer la surprise avec l’arrivée de l’emblématique constructeur allemand. « Aujourd’hui, on compte un nombre significatif de Tunisiens qui roulent en Porsche, essentiellement en 4×4 Cayenne. Mais il y a aussi un vif intérêt pour la 911 Turbo Cabriolet et le Boxster. C’est pourquoi on se doit de se rapprocher de nos clients en Tunisie », explique Éric Antoine, responsable de Porsche pour la région Ouest de la France. Une concession Porsche devrait ainsi ouvrir ses portes à Tunis, d’ici à la fin de l’année 2008. L’objectif est de « vendre 50 unités, voire plus, par an », précise Dev Von Platen, directeur général de Porsche France. Et ce n’est pas tout.
Profitant de la très nette baisse des taux de droit de consommation liés à l’importation des voitures (d’environ 300 % à 100 % au 1er janvier 2007), la société Ennakl, également concessionnaire des marques allemandes Volkswagen et Audi, importe désormais des grosses cylindrées autrefois hors de prix comme la Touareg avec motorisation 3 l. La contagion touche aussi BSB, le représentant tunisien de la firme japonaise Toyota, qui s’apprête à commercialiser, à la mi-juillet, la Toyota Card Cruiser Prado VX pour 98 700 DT, soit 56 180 euros. De l’avis de nombreux professionnels, la croissance du marché des véhicules haut de gamme n’est pas près de s’arrêter. Avec la baisse des taxes et l’arrivée en Tunisie d’investisseurs étrangers qui constituent d’importants clients potentiels, le segment du luxe a de beaux jours devant lui. Quant aux Tunisiens, ils profitent d’une hausse sensible de leur pouvoir d’achat, illustrée par l’émergence d’une classe moyenne. « Bien que la Tunisie, avec plus de 10 millions d’habitants, reste un marché restreint, la hausse du niveau de vie et les facilités de crédit tendent à favoriser l’accroissement du parc automobile, en quantité et en qualité », explique un industriel du secteur. On compte actuellement 98 voitures pour 1 000 habitants et la croissance annuelle est estimée à 6 %, avec en moyenne 50 000 nouvelles immatriculations par an.
Face à l’arrivée de nouveaux concurrents, les marques Mercedes et BMW, respectivement représentées par Le Moteur SA et Ben Jemâa Motors SA, ne semblent pas s’inquiéter outre mesure de cette offensive. « Nous comptons sur la valeur de notre marque et sur la fidélité de nos clients », précise Mohamed Ben Jemâa, directeur général de Ben Jemâa Motors. Et, d’ores et déjà, le groupe a entrepris des changements pour augmenter sa part de marché. Outre l’inauguration en 2006 d’un nouveau show-room aux normes internationales dans la zone industrielle de Charguia II, BMW Tunisie va également entamer, d’ici à la fin de l’année, la rénovation de son atelier après-vente et compte dans le même temps développer son réseau de distribution. Pour le moment, le groupe dispose seulement d’un vendeur indépendant à Sfax. Autre volonté affichée : diversifier sa gamme de produits pour attirer un plus grand nombre de clients. Boosté par les bons résultats du groupe bavarois, qui, en dépit de la morosité ambiante, a livré 1,37 million de voitures en 2006 (+ 3,5 %), Ben Jemâa Motors a aussi, de son côté, réalisé une année 2006 record avec 400 véhicules vendus, soit une progression de 25 % par rapport à 2005. « Nos voitures reflètent la position sociale de leur propriétaire », précise Ben Jemâa, qui ambitionne d’atteindre 2 %, voire 2,5 % de parts de marché en 2007. Chez la société Le Moteur SA, représentant général et concessionnaire automobile de Mercedes (mais aussi de la marque Fiat), la sérénité est également au rendez-vous. « Il est vrai que les dix dernières années ont été marquées par le développement de la concurrence dans le haut de gamme. Certains acheteurs vont sans doute migrer d’une marque à l’autre. Mais ceci ne veut en aucun cas dire que Mercedes perd du terrain, que ce soit en Tunisie ou à l’échelle internationale. Il s’agit toujours d’une référence dans le monde de l’automobile », explique Ghailen Gharbi, sales manager de Mercedes-Benz.
Qu’en pense le public, qui s’est rendu en masse au salon de Tunis ? Du côté des consommateurs, l’heure est à la curiosité. Ils ont été très nombreux à vouloir admirer les seize marques automobiles présentes. Et même s’il y en avait pour toutes les bourses avec des petites cylindrées disponibles à partir de 18 000 DT (10 200 euros), ce sont bien évidemment les grosses berlines, avec un prix dépassant parfois les 200 000 DT (114 000 euros), qui ont attiré toute l’attention. Est-ce à dire pour autant que les Tunisiens vont, à coup de crédits automobiles, céder à la tentation du haut de gamme ? « Aujourd’hui, en Tunisie, posséder une voiture est avant tout une affirmation sociale, voilà pourquoi le haut de gamme a de très beaux jours devant lui », estiment les spécialistes. Mais les citoyens ordinaires venus par centaines ont dû se contenter de caresser des yeux les quatre modèles de la marque Porsche : Boxster, Cayman S, Cayenne et Carrera. Impossible d’y toucher sans carton d’invitation pour accéder au stand. Le rêve a un prix, et n’est pas toujours à portée de main.

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