Ségou, grenier de l’Afrique de l’Ouest
Céréales, maraîchage, élevage, agro-industrie… la zone exploitée par l’Office du Niger, l’un des plus anciens et des plus grands périmètres irrigués de la sous-région, monte en puissance.
Le Mali a-t-il le choix ? Face à la flambée mondiale du prix des céréales, aux aléas climatiques, et alors que plus de 70 % de sa population est agropastorale, le développement du pays – voire sa simple survie (les démographes prévoient un doublement de la population malienne à l’horizon 2025) – passe nécessairement par celui de son agriculture. Une priorité que le président Amadou Toumani Touré (ATT) a réaffirmée dès le début de son deuxième mandat à la tête du pays. L’affectation de 20 % du budget national 2008 à la Loi d’orientation agricole (lancée en février 2005) doit permettre au Mali d’atteindre l’ambition affichée par le Programme de développement économique et social (PDES), à savoir un objectif de production de « 10 millions de tonnes de céréales en 2012 », contre plus de 3 millions actuellement.
Au cÂur du projet présidentiel : la valorisation de l’Office du Niger (ON), une zone de culture du centre du Mali, dans la région de Ségou. Le site en question, lové dans le delta inférieur du fleuve Niger et cultivé depuis la fin des années 1930, représente une immense réserve de 960 000 hectares de terres irrigables, soit près de la moitié du potentiel malien. Dès son élection en 2002, ATT s’attelle à la tâche et aménage dans l’ON près de 50 000 nouveaux hectares, l’objectif final étant de faire passer l’ensemble des surfaces irriguées à plus de 200 000 ha d’ici à 2020, contre à peine 100 000 aujourd’hui. Non content de produire déjà plus de 50 % de la consommation en riz du pays (près de 500 000 tonnes), l’ON développe aussi sa production maraîchère (environ 200 000 tonnes), les cultures sèches de céréales, la pisciculture, l’élevage et la production de canne à sucre Les famines récurrentes des années 1970 et 1980 ont aujourd’hui complètement disparu. La production céréalière est même devenue excédentaire : les prévisions pour 2008 tablent sur une production totale de 3,5 millions de tonnes, soit environ 10 % d’excédents.
Relance des investissements
Motivés par la volonté politique de la présidence et par l’envolée spectaculaire des cours des céréales (+ 110 % pour le blé entre juin 2006 et septembre 2007), certains opérateurs privés multiplient les investissements. Le plus puissant d’entre eux, la société malienne des Grands Moulins du Mali (GMM, filiale du Groupe AMI dont elle réalise 50 % du chiffre d’affaires), intervient de plus en plus directement dans la culture du blé, notamment par la cession de semences à haut rendement aux paysans et l’exploitation d’une unité pilote de 500 ha dans la zone de l’ON. Les GMM, dont la capacité de production de farine au moulin de Koulikoro est déjà de 400 tonnes par jour, doivent aussi mettre en service en juillet 2008 la première usine de fabrication d’aliments pour le bétail (pour un investissement de 3,4 millions d’euros). Ce qui devrait donner un coup de fouet au développement de l’élevage, principale source de revenus pour près d’un tiers de la population rurale.
Autre succès du secteur agricole : la valorisation de la filière mangues, dans laquelle les femmes jouent un grand rôle. Grâce à la professionnalisation des acteurs et au traitement phytosanitaire de 4 000 ha de vergers, les exportations ont augmenté de 290 % entre 2005 et 2007, passant à 8 517 tonnes pour un chiffre d’affaires de 9 milliards de F CFA (13,7 millions d’euros) ! Et quand on sait que les manguiers maliens produisent chaque année 200 000 tonnes de fruits, dont beaucoup ne sont pas récoltés on comprend l’immense potentiel de la filière. D’autant que les marchés à l’exportation, notamment en Europe, sont de plus en plus friands de mangues et ne rechignent pas à y mettre le prix.
Les affres cotonnières
En définitive, la seule ombre – mais de taille – au tableau des avancées agricoles provient, encore une fois, de la filière coton, qui emploie un tiers de la population active et dont la production ne cesse de diminuer depuis plusieurs années pour tomber à 308 000 tonnes cette année, soit 200 000 tonnes de moins qu’en 2006. Le prix d’achat aux paysans, fixé à l’avance, étant trop faible (160 F CFA le kilo, soit 0,24 euro), ces derniers craignent de s’endetter, notamment en raison du prix élevé des intrants (importés). Conséquence : les superficies cotonnières cultivées diminuent. Un cercle vicieux puisque seule leur exploitation peut permettre de financer les fameux intrants indispensables aux cultures à suivre, qu’elles soient céréalières ou maraîchères. À la veille de la privatisation de la Compagnie malienne pour le développement des textiles, prévue en 2008, le moral des cotonculteurs est décidément bien bas.
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