Les bahaïs au ban

Arrestation des dirigeants de la plus importante minorité religieuse du pays… au motif qu’ils seraient des espions israéliens.

Publié le 2 juin 2008 Lecture : 2 minutes.

Si l’on met à part les sunnites (quelque 10 % de la population totale), les bahaïs – souvent présentés comme des dissidents de l’islam – constituent, avec près de 300 000 fidèles, la plus importante minorité religieuse en Iran. Elle est aussi la plus réprimée. Six membres de sa direction ont été arrêtés et incarcérés le 14 mai. Un septième avait été interpellé le 5 mars. Il leur est reproché d’avoir « commis de nombreux crimes politiques » et d’être des « espions israéliens ». Leurs proches peuvent légitimement s’inquiéter, car, depuis l’accession de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence de la République, en 2005, la répression à l’égard des bahaïs s’est accrue. Deux cents d’entre eux ont été emprisonnés au cours des trois dernières années.
Pourquoi le pouvoir s’acharne-t-il sur les adeptes de ce culte ? Bien que né à partir du chiisme, celui-ci n’est ni un schisme ni un syncrétisme, mais une religion à part entière, avec ses textes sacrés, sa liturgie, son calendrier et, surtout, son propre messager divin. Or, selon l’islam, il ne peut y avoir de nouvelle révélation après celle de Mohammed, le « sceau des prophètes ». Pénétré, comme tous les chiites, de l’espoir du retour de l’Imam, le fondateur du bahaïsme, Mirza Ali Mohammed (1820-1850), s’était présenté lui-même comme le Bab (« la porte » en arabe), c’est-à-dire la voie d’accès à Dieu. Accusé d’apostasie, il sera exécuté. Son successeur, Mirza Hussein Ali (1817-1892), rompit totalement avec l’islam, prenant le titre de Bahaa’ullah (« splendeur de Dieu »), d’où le mouvement tire son nom. Exilé en Palestine, il repose à Saint-Jean-d’Acre, près de Haïfa, devenu le lieu saint des bahaïs. C’est justement cet ancrage en Israël qui rend hautement suspecte en Iran cette confession qui a essaimé dans le monde entier, où elle compte aujourd’hui plus de 7 millions d’adeptes séduits par sa modernité et sa tolérance (accord entre foi et raison, liberté religieuse, égalité homme-femmeÂ).
Persécutés depuis toujours dans leur pays, les bahaïs sont carrément proscrits depuis la révolution de 1979. Exclus de l’université, ils sont interdits d’emploi public. Mais les mesures répressives à leur égard ont pris une telle ampleur depuis trois ans qu’une des figures de la République islamique, le grand ayatollah Hossein Ali Montazeri, s’en est ému, affirmant qu’ils sont des citoyens iraniens à part entière.

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