Les 35 ans de « L’Observateur »

Malgré les pressions politiques, le quotidien burkinabè ouvre ses colonnes à toutes les opinions depuis 1973. Un exploit sur le continent.

Publié le 2 juin 2008 Lecture : 2 minutes.

Un marathon de 42 kilomètres, un match de football insolite entre représentants de la majorité présiden­tielle et ceux de l’opposition, la création d’un prix du roman et de nombreux concerts Une dizaine de jours de festivités accompagnent depuis le 24 mai les 35 ans du quotidien burkinabè L’Observateur Paalga (en mooré, « Le Nouvel Observateur »).
Pour son anniversaire, le titre fondé et dirigé par Édouard Ouédraogo a décidé de marquer le coup. L’événement est, il est vrai, assez rare, pour ne pas dire unique. « À travers l’Obs, c’est toute la presse africaine qui est célébrée », explique un journaliste burkinabè. Peu de quotidiens privés au sud du Sahara peuvent en effet prétendre à une telle longévité sur un marché exigu, livré à la fois à une forte concurrence et aux pressions politiques.

Encourager le débat
Né le 28 mai 1973, L’Observateur a toutefois résisté aux modes, aux intimidations et aux franches embuscades dressées sur son chemin par les adversaires d’une presse indépendante. Une liberté de ton qu’Édouard Ouédraogo assume entièrement. Et même au prix fort. Cible des Comités de défense de la révolution (CDR) de Thomas Sankara, son imprimerie a été saccagée et brûlée le 10 juin 1984. Un acte criminel qui occasionnera une cessation de parution durant sept ans, de 1984 à 1991.
« Dès notre apparition, nous avions ouvert nos colonnes à tous les courants d’opinion, explique-t-il. Dans les années 1970, nos jeunes lecteurs exprimaient la nécessité d’une rupture révolutionnaire mais démocratique. Nous voulions encourager le débat. Mais dès qu’ils sont arrivés au pouvoir, ils se sont empressés de nous stigmatiser comme un organe contre-révolutionnaire car nous refusions d’être sous leurs ordres. »
La décrispation du climat politique et la décompression de la phase révolutionnaire redonnent toutefois espoir. Le 15 février 1991, le journal est à nouveau autorisé, à condition de changer de nom. L’Observateur devient alors L’Observateur Paalga, ce qui ne l’empêche nullement de redevenir, comme Le Pays, l’un des journaux phares de la presse burkinabè, à côté du quotidien gouvernemental Sidwaya ou d’autres journaux d’opinion comme L’Indépendant de feu Norbert Zongo. Si le nom a changé, la ligne éditoriale est restée la même. Celui qui se destinait à l’enseignement et qui emploie aujourd’hui 70 salariés la résume ainsi : « Tolérance et ouverture d’esprit », comme pour mieux souligner son caractère non partisan.
Au-delà de la ligne éditoriale, le lecteur retient surtout la « Lettre pour Laye », qui a forgé sa réputation. Paraissant dans l’édition du vendredi, cette rubrique, publiée sous la forme d’une lettre adressée sous le pseudonyme de « Passek Taalé » à son cousin imaginaire « Wambi », fourmille d’informations de première main.
Un rendez-vous que les témoins de la scène politique nationale attendent avec impatience, et qui explique en partie que les ventes franchissent ce jour-là la barre des 10 000 exemplaires, contre 8 000 d’ordinaire.
On a longtemps cru qu’un haut responsable proche de la présidence se cachait derrière cette signature. « Il n’en est rien, explique Ouédraogo. Il s’agit d’une Âoeuvre collective de la rédaction. » Ce qui fait d’autant plus honneur à cette publication dont une version numérique, différente de la version papier, est à l’étude.

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