Contre les idées reçues

Des sociologues se penchent sur le monde du travail algérien.

Publié le 2 avril 2007 Lecture : 2 minutes.

« Les Algériens sont de piètres travailleurs, ils ont par conséquent besoin de chefs forts, voire autoritaires, qui les encadrent de procédures et de bureaucratie. » Définition ? Non : idée reçue quoique courante, que s’attache à battre en brèche Culture & Gestion en Algérie*, intéressant ouvrage de 200 pages qui paraît aux éditions Anep, permettant enfin aux managers algériens de le découvrir (il était sorti en 1997 à l’étranger). Sur la base d’une enquête menée auprès de plus de mille salariés dans les entreprises algériennes, les auteurs démontrent que les styles et méthodes de management en vigueur dans le pays sont en opposition plus ou moins prononcée avec la culture de la population. Le malaise est profond, puisqu’il trouve son origine dans la structure de l’entreprise française des années 1950, appliquée en Algérie comme ailleurs, dont les traits les plus bureaucratiques ont été figés, sans doute rigidifiés, par le modèle « socialiste » adopté après l’indépendance.
En réalité, affirment les quatre sociologues et consultants qui ont mené l’enquête, le salarié algérien veut non pas un chef fort, mais un chef légitime, un mâalem celui qui sait », dans le parler algérien). Quelqu’un qui est dépositaire d’un savoir et qui est capable de le partager avec ses collaborateurs. Il le fera d’autant plus volontiers, et ceux-ci apprécieront d’autant plus, que l’oralité est incontestablement une donnée fondamentale de la culture algérienne. Or, que fait-on habituellement en matière de communication dans l’entreprise algérienne ? De la bureaucratie : des circulaires, des notes d’information et autres écrits à caractère administratif ! Autant de malentendus qui engendrent des réactions d’indifférence chez les salariés, qui tendent par exemple à devenir individualistes, à ne pas s’intéresser au travail d’équipe et, plus généralement, aux performances d’ensemble, donc à celles de leur entreprise.
Et voilà pourquoi, concluent les auteurs, les Algériens ont une réputation de « piètres travailleurs » alors que leur enquête révèle qu’ils ont le même rapport au travail que les Sud-Coréens ou les Malaisiens. Encore faut-il, pour parvenir au même dynamisme économique, revoir de fond en comble le modèle et l’organisation de l’entreprise algérienne.

* Culture & Gestion en Algérie, par Daniel Mercure, Baya Harricane, Smaïl Seghir et André Steenhaut, éditions Anep.

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