Attentat contre l’avion du président rwandais Habyarimana

Publié le 2 avril 2007 Lecture : 3 minutes.

Rentrant de Dar es-Salaam, où il vient de participer à un sommet régional en compagnie de ses homologues tanzanien, ougandais, kényan et burundais, le président rwandais Juvénal Habyarimana a effectué un vol sans histoire lorsque son avion s’apprête à se poser sur l’aéroport de Kigali, ce 6 avril 1994. En compagnie de Cyprien Ntaryamira, le nouveau chef de l’État burundais qu’il a invité à voyager avec lui, Habyarimana discute probablement de l’accord qu’ils viennent de finaliser en Tanzanie pour enterrer les conflits politico-ethniques qui minent leurs pays. Mais soudain, le Falcon 50 présidentiel essuie le tir de deux ou trois roquettes – leur nombre diffère selon les sources – qui le pulvérisent. Il n’y a aucun survivant. Outre les deux présidents, deux ministres burundais, mais aussi le chef d’état-major de l’armée rwandaise, quatre collaborateurs d’Habyarimana et les trois membres d’équipage – français – de l’appareil mis à la disposition du chef de l’État rwandais par la France trouvent la mort.

Si le Burundi voisin reste calme malgré la disparition de son deuxième président en moins de six mois, un nouveau cycle infernal de tueries et de pillages s’enclenche dans les rues de Kigali. Les Tutsis sont pris pour cible par des militaires de la garde présidentielle, hutue, dès les premières lueurs de l’aube, le lendemain. Des hordes de jeunes armés de machettes, de lances, de gourdins et de grenades se joignent à la chasse à l’homme. Assoiffés de vengeance, ils font preuve d’une violence sans limite. Les Hutus modérés et les étrangers sont eux aussi traqués. Le Premier ministre, Agathe Uwilingiyimana, est abattue avec trois observateurs militaires belges de la Mission des Nations unies d’assistance au Rwanda (Minuar) chargée de sa protection. Dix-sept prêtres rwandais sont assassinés. Rapidement, les massacres se généralisent et les Occidentaux évacuent leurs ressortissants. Le pays tout entier plonge dans un bain de sang qui ne prendra fin que trois mois plus tard avec la prise de Kigali par les troupes du Front patriotique rwandais (FPR). On estime entre 800 000 et 1 million le nombre de morts, tutsis dans leur immense majorité.

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Considérée comme l’élément déclencheur du génocide, la destruction de l’avion d’Habyarimana fait aujourd’hui encore l’objet de débats passionnés, la responsabilité de l’attentat n’ayant toujours pas été arrêtée. Une première thèse, pour le moins controversée, attribue les tirs de roquettes au FPR – tutsi – de Paul Kagamé, engagé depuis plus de trois ans dans des combats contre le régime rwandais. Son objectif aurait été de prendre le pouvoir aux Hutus par un coup d’État. L’autre argumentaire en attribue, au contraire, la responsabilité aux extrémistes hutus de l’entourage d’Habyarimana. Hostiles à l’idée de partager le pouvoir avec les Tutsis depuis les négociations sur les accords de paix d’Arusha, le 4 août 1993, ils auraient voulu faire échec au processus en éliminant les partisans du compromis.
Quoi qu’il en soit, l’horreur dans laquelle s’enfonce alors le Rwanda n’est que l’aboutissement de plus de trente-cinq années de haine entre les Hutus, qui représentent 85 % de la population, et les Tutsis. Depuis la « Toussaint rwandaise » de 1959, ces derniers n’ont qu’une idée en tête : revenir sur une terre dont ils ont été chassés. Ils tenteront de le faire à plusieurs reprises dans les années 1960, en vain. En septembre 1990, le FPR, autour duquel ils se sont rassemblés, lance une vaste offensive qui débouche sur l’occupation de la partie nord du Rwanda, en juillet 1992. Face à une situation qui risque de dégénérer à tout instant, l’ONU s’empare du dossier, et des pourparlers de paix sont organisés l’année suivante. Mais devant l’hostilité des deux camps, toute discussion est abandonnée.

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