« Un fils du Sud », vent debout contre la ségrégation raciale

Dans ce film coproduit par Spike Lee, le réalisateur américain Barry Alexander Brown retrace le parcours de Bob Zellner. L’un des rares Blancs qui, au cours des années 1960, participa au combat pour les droits civique en Alabama, au péril de sa vie.

Dans « Un fils du Sud », le comédien Lucas Till incarne Bob Zellner, un étudiant blanc militant contre la ségrégation dans les États-Unis des années 1960. © Busch Media Group

Renaud de Rochebrune

Publié le 18 mars 2022 Lecture : 3 minutes.

Rien d’étonnant si l’un des producteurs exécutifs d’Un Fils du Sud se nomme Spike Lee, alors que ce dernier apparaît plus souvent au générique des longs-métrages en tant réalisateur qu’en tant que « coach » d’un autre auteur. Il y a en effet deux bonnes raisons à cela. La première, c’est que quand Barry Alexander Brown n’est pas derrière la caméra comme c’est le cas ici, il fait régulièrement office de monteur des œuvres de son célèbre confrère, de Do the Right Thing à BlacKkKlansman. Seconde raison de cette participation du cinéaste afro-américain : le sujet du film, qui ne pouvait que lui plaire et le mobiliser.

À deux doigts du lynchage

Le « fils du Sud » qu’évoque le titre du film se prénomme Bob Zellner. Un étudiant blanc très brillant inscrit dans une université de l’Alabama, mais aussi le petit-fils d’un des leaders du Klu Klux Klan de la région, qui décide, au début des années 1960, de s’engager corps et âme dans le combat pour les droits civiques aux États-Unis. Fiancé à une belle jeune femme bien sous tous rapports qui suit le même parcours que lui, il prépare une thèse sur les relations interraciales, pour laquelle il ne se contente pas de travailler en bibliothèque, préférant aller regarder ce qui se passe sur le terrain. Et c’est ainsi que son avenir tout tracé se retrouve soudain remis en question après avoir assisté à une manifestation d’Africains-Américains réprimée par la police, puis rencontré Rosa Parks. Laquelle, en refusant de céder sa place dans un autobus à un Blanc, avait défié quelque temps auparavant la politique de ségrégation de l’Alabama et obtenu, après un long bras de fer juridique, qu’un arrêt de la Cour suprême justifie son acte de révolte courageux et pionnier.

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Au fil du film, on découvre que Zellner, dont les parents sont plutôt libéraux, a développé très tôt une conscience antiraciste. Et que, depuis le temps de son adolescence, il doit expier des actes racistes qu’on l’a forcé à commettre. Mais cela ne suffit pas à expliquer la détermination avec laquelle il va participer – seul Blanc le plus souvent – aux luttes collectives des Noirs pour la reconnaissance de leurs droits civiques. Des actions très risquées dans un Sud américain où les hommes politiques, les juges et la majorité de la population encouragent une répression féroce et la mise hors d’état de nuire de ces « fauteurs de trouble » que sont tous ceux qui combattent – même de façon non violente comme l’exigent leurs leaders – la ségrégation raciale. À tel point que l’étudiant, qui a déjà dû affronter l’hostilité de tous ses anciens camarades d’université, va se retrouver un jour la corde au cou, à deux doigts d’être lynché.

Entre fiction et documentaire

Né en 1939 et toujours vivant, Bob Zellner a aujourd’hui 82 ans. Et si ce film qui lui est consacré est tourné comme une fiction, il ressemble fort à un documentaire. Au fur et à mesure de son déroulement, on apprend ainsi, sous une forme quasi-pédagogique, de quelle façon s’est développée la lutte pour l’égalité entre les Noirs et les Blancs aux États-Unis, comment se sont comportés les leaders du mouvement antiraciste dans les États du Sud ou encore à quoi pouvait ressembler une session d’entraînement à la résistance non-violente face aux agissements de la police. En résulte un long-métrage de facture classique, qui a le défaut de s’apparenter à un film militant, avec la part de manichéisme qui va souvent de pair.

On est tellement d’accord à chaque instant avec le combat que mènent Zellner et tous les activistes africains-américains qu’il côtoie, on repère avec une telle facilité qui sont « les bons et les méchants », qu’on ne peut jamais véritablement se poser de questions sur les origines et les conséquences du racisme dans l’Amérique des années 1960. Mais si le but premier du film était d’instruire tous ceux qui veulent découvrir ce que fut la lutte pour les droits civiques, l’objectif est atteint. Et la page d’histoire qu’ont écrit les héros de ce long-métrage méritait sans aucun doute d’être contée.

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Un fils du Sud, de Barry Alexander Brown. Sortie en France le 16 mars 2022.

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