Huit milliards seulement en 2020

La natalité étant presque partout en baisse, y compris en Inde et en Chine, les prévisions alarmistes ne sont plus de mise.

Publié le 3 novembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Pour les démographes qui prédisaient une croissance exponentielle de la population mondiale au XXIe siècle, le choc est rude. Depuis la fin de 2003, la majorité de l’humanité vit dans un pays ou une région où la fécondité est inférieure à 2,1 enfants par femme, le seuil en deçà duquel le renouvellement des générations n’est plus assuré (voir encadré).
Il y a cinquante ans, comme le rappelle le numéro d’octobre de Population et Sociétés, le bulletin de l’Institut national d’études démographiques (Ined), seuls quatre petits États européens étaient sous ce seuil « fatidique » : l’Autriche, l’Estonie, la Lettonie et le Luxembourg. Toutes les autres nations industrialisées enregistraient encore une fécondité comprise entre 2,1 et 3,5 enfants par femme. Et, dans la plupart des régions en développement, l’indice était supérieur à 5. À l’échelle mondiale, la médiane était de 5,4 enfants par femme : la moitié de l’humanité vivait dans des régions où elle était supérieure à ce taux, l’autre moitié dans des régions où elle lui était inférieure.
Un quart de siècle plus tard, la situation avait déjà considérablement changé. Dans une grande majorité des régions développées, la fécondité était tombée en dessous du seuil de remplacement, alors qu’elle déclinait sensiblement dans nombre de pays du Sud. Résultat : l’indice mondial médian était passé à 3,6.
Si, aujourd’hui, ce dernier est descendu à 2,1, c’est que le mouvement de baisse de la natalité s’est étendu à de vastes régions de ce qu’on appelait hier encore le Tiers Monde. Des pays comme le Brésil (2,01 enfants par femme), la Thaïlande (1,91) ou la Tunisie (1,90) se situent ainsi désormais en dessous des États-Unis (2,07). Mais c’est surtout les deux grands géants asiatiques qui ont fait pencher la balance. À l’exception de quelques provinces de l’intérieur comme le Guizhou et le Yunnan, partout, en Chine, la fécondité est désormais inférieure à 2,1 enfants, voire à 1,5 pour ce qui est des zones littorales. En Inde, de même, plusieurs États, dont trois situés dans le Sud (Kérala, Tamil Nadu et Andra Pradesh), sont en dessous du seuil de remplacement.
Cette évolution est d’autant plus étonnante que l’on pensait jusqu’ici que les changements démographiques étaient induits par les changements économiques et sociaux. Or ces derniers ont été nettement moins rapides que la baisse de la natalité. Dans nombre de pays touchés par cette baisse, le revenu moyen n’a que peu progressé, tandis que l’instruction n’a pas connu non plus d’avancées remarquables. Ce qui laisse à penser, concluent Gilles Pison et Chris Wilson, les auteurs de l’article publié par l’Ined, que d’autres facteurs sont intervenus, notamment une évolution des mentalités.
Mais que l’on ne s’y trompe pas. Ce n’est pas demain que la population mondiale va chuter. Près de 20 % de l’humanité a encore une fécondité supérieure à 4 enfants par femme. Les régions concernées sont, d’une part, la bande qui va de l’Afghanistan au nord de l’Inde, et, d’autre part, un vaste espace incluant le gros de la péninsule Arabique et l’Afrique au sud du Sahara. C’est dans ces deux aires que se concentrera l’essentiel de la croissance démographique dans les décennies à venir. La Terre devrait abriter 8 milliards d’habitants en 2020, contre 6 milliards en 2000. C’est nettement moins catastrophique que les 12 milliards annoncés par certains spécialistes au cours des années 1970. Le vrai problème sera plutôt le vieillissement de la population dans une très grande partie du monde.

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