Rwanda : à Kigali, Emmanuel Macron tente une réconciliation à haut risque
« L’Afrique selon Macron » (5/7). Le 27 mai 2021, le président français arrive dans la capitale rwandaise, soucieux d’apaiser enfin la relation délétère entre Paris et Kigali. Ce dossier empoisonné, il l’a hérité des années Mitterrand et, longtemps, celui-ci a été alimenté par la controverse autour du rôle de la France dans le génocide contre les Tutsi.
L’Afrique selon Macron
Quelle a été la politique africaine du président français ? Retrait de Barkhane du Mali, pas de danse au Nigeria, restitution d’œuvres d’art au Bénin… À deux semaines du premier tour de la présidentielle, Jeune Afrique en dessine les grandes lignes à travers sept épisodes, entre innovation et realpolitik.
« Ijoro ribara uwariraye. » Le 27 mai 2021, c’est par cette maxime que commence le discours prononcé par Emmanuel Macron après son arrivée à Kigali. Au mémorial de Gisozi, dédié aux victimes du génocide commis en cent jours contre un million de civils tutsi exterminés à raison de leur naissance, le président français a choisi d’emprunter au kinyarwanda la première phrase de son discours, traduite pour l’occasion : « Seul celui qui a traversé la nuit peut la raconter. »
Qu’elle fut laborieuse, l’écriture de cette allocution sensible prononcée dans ce sanctuaire où reposent plusieurs milliers de dépouilles anonymes des victimes du génocide perpétré contre les Tutsi d’avril à juillet 1994. « Durant une partie de la nuit, il a retravaillé son texte avec ses conseillers », témoigne un protagoniste présent dans l’avion présidentiel qui reliait Paris à Kigali.
Le général et l’adolescente
Outre les officiels et chefs d’entreprise conviés dans la délégation française, deux personnes que tout semblait opposer, assises à quelques rangées d’écart, illustrent le renversement de situation qui est alors en train d’accoucher d’une relation renouvelée entre Paris et Kigali. D’un côté, le général français Jean Varret, 87 ans. Il a depuis longtemps pris sa retraite et, malgré les quatre étoiles accrochées à son uniforme, il ressasse depuis 1993 l’amertume suscitée par son dernier terrain d’opération. De 1990 à 1993, à Paris, il fut le chef de la Mission militaire de coopération, à une époque où la situation au Rwanda – une rébellion armée cherchant à prendre le contrôle d’un pays ami de la France – figurait au sommet des préoccupations de l’Élysée.
Contrairement à d’autres officiers servant sous le drapeau tricolore, aveuglés par une guerre qui ne disait pas son nom au cœur de l’Afrique des Grands lacs, lui avait vu poindre l’ombre du génocide dans les desseins du régime du président Juvénal Habyarimana et s’en était ému. Ses tentatives visant à alerter l’état-major des armées, à Paris, s’étaient pourtant avérées vaines. Au point qu’il avait préféré quitter « la Grande Muette » avant le terme de sa carrière.
En arrivant en France, j’ai découvert que le monde savait mais n’avait rien fait pour nous
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