Faute de mieux…

Face au refus de l’opposition de rejoindre le gouvernement, la formation du président s’est repliée sur elle-même. Et s’est approprié un maximum de portefeuilles au sein de la nouvelle équipe.

Publié le 1 septembre 2003 Lecture : 3 minutes.

Reconduit, le 23 août, par le président Abdoulaye Wade, le Premier ministre Idrissa Seck a formé, le 28 août, le cinquième gouvernement de l’ère Wade (voir la Grande Interview du président Wade, par François Soudan, pp. 20-26). Dans une atmosphère politique que lui-même a qualifiée de délétère, le chef de l’État sénégalais a semblé pris de court par la démission que lui a présentée, le 22 août, son premier collaborateur au sein du Parti démocratique sénégalais (PDS) et de l’État.

Idrissa Seck revenait de vacances jugées longues (un mois) et inopportunes, au moment où le pays était victime de graves inondations, et le président attaqué de front par le journaliste Abdou Latif Coulibaly à travers son livre, Wade, un opposant au pouvoir : l’alternance piégée ? Il est vrai que les relations entre les deux hommes n’étaient pas au beau fixe : Wade a pris plusieurs décisions qui désavouaient Seck tandis que des cercles proches de la présidence animaient des journaux violemment opposés au Premier ministre.

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De source bien informée, le président projetait de remanier le gouvernement en septembre afin d’y introduire des personnalités de l’opposition. Après cinq jours de concertation avec Idrissa Seck, l’ancien Premier ministre Moustapha Niasse (Alliance des forces de progrès), Ousmane Tanor Dieng (Parti socialiste) ou encore de Djibo Kâ (Union pour le renouveau démocratique) ont décliné l’offre d’Abdoulaye Wade. Ce dernier, qui dit renouveler sa confiance à son Premier ministre, n’aura pas réussi à réunir ses opposants autour de l’idée d’une « union des fils du pays autour de l’essentiel ». Face à ce refus, sa formation politique s’est repliée sur elle-même, s’appropriant un maximum de portefeuilles ministériels.

Le général Mamadou Niang, qui s’est forgé une réputation de républicain lorsqu’il présidait l’Observatoire national des élections, a été remplacé au ministère de l’Intérieur par un pur produit du PDS, Macky Sall, ancien ministre de l’Énergie et des Mines. C’est à lui qu’incombera la tâche, s’il reste à ce poste jusque-là, d’organiser les prochaines élections législatives, en 2006.

Eva-Marie Coll Seck, venue de l’Onusida pour diriger le département de la Santé, a cédé la place au Dr Issa Mbaye Samb, qui a fait ses classes au sein du parti présidentiel. Ces deux éléments de la société civile limogés, le PDS a aussi rogné sur les postes de ses alliés politiques au sein du gouvernement. Les anciens ministres de l’Emploi, Yero Deh, et de l’Environnement, Modou Diagne Fada, échangent leurs postes. Ce dernier, également porte-parole du PDS, va ainsi gérer le programme déjà ficelé de la création de quinze mille emplois et bénéficier d’un front social apaisé. Ce qui n’est pas négligeable, d’un point de vue électoral, dans un pays où le taux de chômage est de 40 % et où seulement 38 % de la population vit au-dessus du seuil de pauvreté. Enfin, Aminata Tall, adversaire déclarée d’Idrissa Seck au sein du PDS, a été nommée ministre d’État à la présidence de la République (sans portefeuille).
Composé de trente-quatre membres, le nouveau gouvernement fait d’ailleurs la part belle aux ministres sans portefeuille : ils sont sept au total, quatre dans le gouvernement, trois à la présidence de la République.

Pour remplacer Idrissa Seck au poste de directeur de cabinet de Wade, non pourvu depuis le 5 novembre 2002, le chef de l’État a choisi Kader Sow, qui va devoir quitter ses fonctions de directeur de la Banque de l’habitat. Ousmane Ngom et Jean-Paul Dias, des personnalités du PDS, qui ont réintégré le parti récemment, ne figurent pas dans le gouvernement. Seraient-ils en réserve de la République, le temps pour Abdoulaye Wade de mettre Idrissa Seck à l’épreuve des attentes placées par les populations dans le sopi (« changement » en wolof) ?

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