Droit au retour : la fin d’un mythe

Ils ne sont plus que 10 % à envisager de revenir sur les terres de leurs ancêtres. À supposer que Tel-Aviv les y autorise.

Publié le 1 septembre 2003 Lecture : 2 minutes.

Selon un sondage conduit mi-juin par le Center for Policy and Survey Research (CPSR, basé à Ramallah), 95 % des réfugiés palestiniens sont favorables à une reconnaissance d’Israël comme État juif si celui-ci accepte d’appliquer la résolution 194 des Nations unies, adoptée le 11 décembre 1948, qui stipule qu’Israël doit reconnaître le droit au retour des réfugiés. Mais sur les 4 560 réfugiés interrogés, 10 % seulement envisageraient de revenir sur les terres dont ils ont été chassés en 1948 et de prendre la nationalité israélienne, 90 % iraient s’installer dans le nouvel État palestinien et 54 % accepteraient des compensations financières.
L’agence des Nations unies pour les réfugiés (UNRWA) dénombre actuellement 4 millions de réfugiés palestiniens (1,5 million en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, 2,5 millions au Liban, en Syrie et en Jordanie). Ils représentent 50 % de la population totale palestinienne et ont toujours été un enjeu dans les négociations de paix. Leur statut devra être réglé lors de la dernière phase des pourparlers menés dans le cadre de la feuille de route.
Pour Israël, des assurances explicites doivent être données sur son droit à exister comme État juif et sur l’abandon de tout droit au retour. C’est un des quatorze « amendements » israéliens à la feuille de route. « Le droit au retour est une recette pour la destruction d’Israël », a affirmé Ariel Sharon, le 6 mai dernier. Aujourd’hui, l’État hébreu compte 5,5 millions de Juifs et 1,2 million d’Arabes. Si tous les réfugiés retournaient sur les terres qu’ils occupaient avant 1948, la population de l’État hébreu deviendrait alors majoritairement arabe. Selon l’écrivain israélien pacifiste Amoz Oz, « [la reconnaissance du droit au retour] fera du peuple juif une minorité ethnique à la merci des Arabes ».
Côté palestinien, on s’abrite derrière la résolution 194, aux termes de laquelle « il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible ». Et l’Autorité palestinienne a fait de la reconnaissance par Israël de ce droit une condition essentielle de la paix. « C’est le droit de chaque réfugié et je ne peux pas y renoncer », a déclaré le Premier ministre palestinien Mahmoud Abbas, en mai dernier.
Mais si l’attention est focalisée sur la résolution 194, il ne faut pas oublier sa « petite soeur », la résolution 181, votée le 29 novembre 1947, stipulant que deux États doivent voir le jour au Proche-Orient : un État juif et un État palestinien. Le droit au retour, s’il est reconnu, ne doit pas menacer le caractère juif de l’État d’Israël, et devra donc être réglementé.
Pour le moment, chaque partie campe sur ses positions. Intifada oblige. Mais à Taba, en janvier 2001, Israël s’était dit prêt à accueillir entre 25 000 et 70 000 réfugiés. En outre, l’État hébreu pourrait être favorable au retour des réfugiés nés avant 1948, au nombre de 400 000, catégorie « non problématique » pour la sécurité et la démographie du pays. Quant aux Palestiniens, même s’ils continuent à réclamer d’Israël – pour le principe – la reconnaissance du droit au retour, ils ont vraisemblablement renoncé, dans leur très grande majorité, à un rêve vieux de cinquante-cinq ans.

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