Bilan social contrasté

Les conditions de vie des Noirs connaissent un léger mieux. Mais les disparités sont toujours criantes.

Publié le 28 juillet 2003 Lecture : 3 minutes.

L’Afrique du Sud va globalement mieux. Du moins si l’on en croit les chiffres du dernier recensement, rendus publics le 8 juillet dernier. Les premières exploitations des données recueillies par Statistics South Africa en octobre 2001 décrivent 44,8 millions de Sud-Africains mieux logés, mieux éduqués et, surtout, moins catalogués selon la couleur de leur peau qu’en 1996, date du dernier recensement. À la différence de la France, par exemple, où aucun chiffre officiel ne peut être publié sur des spécificités raciales, religieuses ou linguistiques qu’on juge propices à la discrimination, la tradition anglo-saxonne, fondée sur la reconnaissance des communautés, n’hésite pas à les demander. Cela tombe bien : le gouvernement de la nouvelle Afrique du Sud a grandement besoin de chiffres précis sur les conditions de vie de ses citoyens et, surtout, sur l’amélioration, puisque c’est le cas de celles des Black Africans.
En cinq ans, la population a augmenté de 10 %, les Noirs représentant aujourd’hui 79 % des Sud-Africains, contre 76,7 % en 1996, et les Blancs 9,6 %, contre 10,9 %.
Pourtant, si certains chiffres montrent de réelles améliorations, la situation est encore loin d’être parfaite. Certes, les Noirs ont désormais majoritairement accès à l’électricité (62 % d’entre eux, contre seulement 43,4 % en 1996). Mais le chiffre atteint quasiment 100 % pour les Blancs. Même chose pour les biens d’équipement : si environ 9 % de la population sud-africaine possède un ordinateur à domicile, la répartition ethnique témoigne d’une importante disparité. Seuls 2 % des ménages où le chef de famille est noir en possèdent un, contre 46 % de ceux où il est blanc. De la même manière, si 24 % des familles sud-africaines possèdent une ligne de téléphone fixe, le ratio tombe à 12 % pour les familles noires.
Les jeunes Blancs font toujours de meilleures études que leurs concitoyens noirs : ils sont respectivement 29,8 % et 5,2 % à suivre des études supérieures. Le taux de chômage, qui a augmenté de 5 % au niveau national pour atteindre 24 % de la population active – signe de la fragilité de l’économie -, est bien plus fort chez les Noirs (28 %), les métis (17 %), les Indiens ou les Asiatiques (10 %) que chez les Blancs (4 %).
Un bilan toujours contrasté donc, mais qui laisse beaucoup d’espoir. Tandis que les Blancs sont environ 40 % à avoir terminé leurs études secondaires (+ 0,2 % par rapport à 1996), le taux de Noirs dans une situation similaire a grimpé de 4 % en cinq ans. Aujourd’hui, 22,3 % des Noirs n’ont pas du tout été scolarisés, contre 24,3 % en 1996. Ce taux est, il faut le noter, en légère hausse (de 1,2 % à 1,4 %) dans la population blanche.
Malgré les enseignements qu’il apporte, le recensement quinquennal sud-africain est pourtant critiqué pour son coût très élevé. Un milliard de rands (115 millions d’euros) ont été dépensés par l’État pour le réaliser, une somme élevée au regard de ce que dépensent la France, les États-Unis ou le Canada pour les leurs : environ 180 millions d’euros chacun, et ce une fois tous les dix ans. Certains spécialistes estiment effectivement que réaliser l’exercice à un rythme décennal est suffisant, et même plus efficace, pour dégager de grandes tendances sociales.
Le recensement sud-africain a surtout coûté la vie à quinze des personnes employées pour quadriller le pays, mortes dans des accidents ou à la suite de violences manifestées à leur égard, notamment par des Blancs.
Malgré tout, ces chiffres restent essentiels pour les autorités, comme l’a rappelé Trevor Manuel, le ministre des Finances. « Nous avons besoin de bonnes statistiques pour mieux planifier nos actions et améliorer la distribution de l’eau, de l’électricité, de l’éducation et du logement. » Reste encore à exploiter de nombreuses données qui ne seront publiées qu’en octobre prochain. Dont la mortalité. Un chiffre clé, puisqu’il pourrait témoigner d’une tendance annoncée par les associations de lutte contre le sida : en 2015, la population pourrait bien être de 25 % inférieure à ce qu’elle aurait été sans la pandémie. Que ces prévisions se réalisent et tout plan de développement à long terme sera rendu caduc.

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