Arnaud Goma : « L’Amérique a bien élu Obama ! »

Originaire du Congo-Brazzaville, le père Goma, 38 ans, est prêtre à la paroisse Saint-Denys de la Chapelle, à Paris.

Le père Goma, premier curé noir de Paris. © DR

Le père Goma, premier curé noir de Paris. © DR

Clarisse

Publié le 27 février 2013 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Comment avez-vous réagi à la renonciation de Benoît XVI ?

Arnaud Goma : Trois minutes avant le début d’un office que je m’apprêtais à célébrer, j’en ai été informé par deux SMS, que j’ai pris pour des canulars. J’ai d’ailleurs exhorté mes fidèles à ne pas accorder le moindre crédit à cette rumeur. Mais, à la fin de la messe, j’ai vu que l’information était diffusée sur tous les sites internet et les réseaux sociaux. J’en ai été très retourné : la renonciation du pape était pour moi inimaginable.

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Était-ce vraiment une surprise ?

Je n’ai jamais rencontré Benoît XVI, mais je l’ai en revanche beaucoup lu. Avec le recul, je me rends compte qu’à plusieurs reprises il avait évoqué son départ. Par exemple, dans Lumière du monde, un livre-entretien avec le journaliste allemand Peter Seewald, il affirme de manière assez énigmatique qu’un pape qui reconnaîtrait en toute clarté ne plus pouvoir physiquement, psychiquement et spirituellement assumer la charge de son ministère a le droit et même le devoir de se retirer.

Des Africains figurent parmi les cardinaux capables de prendre la relève. Quelles seraient les conséquences de l’élection d’un pape africain ?

Pour que cela soit envisageable, il faudrait que les cardinaux européens, majoritaires dans le collège des électeurs, le veuillent bien. C’est donc une intercession, mais aussi un appel que je lance à l’Église d’Europe : l’Europe ne doit plus être l’unique berceau de l’Église. Le moment est venu de donner l’image d’une Église plus ouverte, plus universelle. Barack Obama a été élu aux États-Unis alors que rien ne le laissait présager. L’élection d’un pape noir serait un signal fort de l’Église, qui prouverait que le monde chrétien est en phase avec l’évolution de l’humanité. Ce serait une forme de reconnaissance envers la foi qui s’exprime si fortement en Afrique. Et ce serait aussi reconnaître que la mission évangélisatrice menée par l’Europe n’a pas été vaine. Mais les cardinaux oseront-ils ? Je prie pour cela, et à Dieu rien n’est impossible…

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Avez-vous un favori ?

J’ai un faible pour certains cardinaux : le Guinéen Robert Sarah, tout comme le Nigérian Francis Arinze, connaît parfaitement la machine vaticane, ce qui est un atout. Le fait de compter des Africains parmi les cardinaux éligibles est déjà en soi une victoire, la preuve de l’intégration réussie de l’Afrique à Rome.

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Vous semblez écarter l’Amérique du Sud…

Citer des Africains ne signifie pas écarter l’Amérique du Sud ou l’Asie. Cela revient à souligner que l’Afrique n’est pas le dernier de la classe. Il faut cependant rester lucide : ce sont essentiellement les non-Européens qui évoquent l’éventualité d’un pape venu d’ailleurs. L’arrivée d’un pape polonais fut une révolution, celle d’un pape allemand, un coup de tonnerre. On pourrait poursuivre ce mouvement de fond. D’ailleurs, ce ne serait qu’un juste retour vers le passé : Pierre, le premier pape de l’Histoire, était un Juif venu de Jérusalem.

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Propos recueillis par Clarisse Juompan-Yakam

* Il est l’auteur d’Arnaud, premier curé noir de Paris (éd. Nouvelle Cité, 2013).

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