Algérie : psychodrame à la Fédération algérienne de football

Moins de quarante-huit heures après l’élimination des Fennecs du Mondial, la Fédération algérienne a déposé un recours auprès de la Fifa dans l’espoir que le match soit rejoué. En cause, l’arbitrage.

Charaf-Eddine Amara, le président démissionnaire de la FAF, lors du match Algérie-Cameroun, le 29 mars, à Blida. Charaf Eddine amara president of the Algerian football federation during the second leg of the African Qualifiers football match for the Qatar 2022 World Cup between Algeria and Cameroon at the Mustapha Tchaker stadium in the city of Blida on March 29, 2022 © APP/NurPhoto via AFP

Alexis Billebault

Publié le 1 avril 2022 Lecture : 4 minutes.

Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis la défaite des Fennecs, le 29 mars, à Blida, face au Cameroun (1-2, 1-0 à l’aller) et leur élimination surprise de la Coupe du Monde au Qatar (21 novembre-18 décembre 2022). Le 31 mars, en fin de matinée, Charaf-Eddine Amara, le président de la Fédération algérienne de football (FAF), élu en avril 2021, a présenté sa démission, ainsi que celle de son bureau. Lors de sa conférence de presse de départ, le désormais ex-boss du football algérien n’a pas mâché ses mots, rejetant les accusations de « négligence ».

L’intérim sera assuré par Mohamed Maouche (86 ans), le premier vice-président, le temps d’organiser une nouvelle élection, qui aura lieu dans les prochaines semaines. Ancien joueur de l’équipe du FLN, il a été désigné par le président démissionnaire. Une décision qui fait polémique en raison de l’âge de l’intéressé.

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Quelle chance pour le recours ?

Mais avant de tirer sa révérence, Charaf-Eddine Amara a déposé un recours devant la Fifa dans l’espoir qu’elle fasse rejouer le match contre le Cameroun. Les Algériens, Djamel Belmadi en tête, n’ont pas vraiment apprécié l’arbitrage du Gambien Bakary Gassama, pourtant considéré comme l’un des meilleurs du continent. L’instance a fustigé, dans un communiqué, « un arbitrage scandaleux ayant faussé le résultat du match Algérie-Cameroun ».

Lors de sa conférence de presse, Charaf-Eddine Amara a cependant tenté de calmer le jeu. « Que des arbitres aiment l’Algérie ou un autre pays n’est pas un motif de récusation ! Nous ne sommes pas seuls sur ce continent », a-t-il déclaré.

Avant d’ajouter : « Beaucoup de gens réclament de moi d’être plus influent, mais j’assume : ce que font les fédérations est souvent à la limite de la légalité. Je n’engagerais jamais l’Algérie dans un processus immoral. » Et de conclure : « Si vous me demandez d’acheter un arbitre, je refuserai de le faire. »

La FAF a également demandé l’ouverture d’une enquête par les organes de la Fifa afin de faire « toute la lumière sur l’arbitrage. La FAF usera de l’ensemble des voies légalement permises pour se faire rétablir dans ses droits et rejouer la rencontre dans des conditions garantissant l’honnêteté et l’impartialité de l’arbitrage ».

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Les Algériens se sont plaints plusieurs fois de l’arbitrage pendant la rencontre. Djamel Belmadi s’est de nouveau longuement attardé sur ce point précis lors de la conférence de presse d’après-match. Plusieurs faits de jeu ont en effet provoqué sa colère, dont une supposée faute camerounaise sur le défenseur algérien Aïssa Mandi lors de l’ouverture du score des Lions indomptables par Éric Maxim Choupo-Moting et un but refusé à Islam Slimani, après consultation de l’assistance vidéo (VAR).

La fédération sait pertinemment que sa démarche n’aboutira pas, à moins qu’elle ne prouve que l’arbitre a été corrompu

A priori, ce recours a très peu de chances d’aboutir. Le règlement de la Fifa établit que « les décisions de l’arbitre sur des faits en relation avec le jeu sont sans appel, y compris la validation d’un but et le résultat d’un match » et sonne déjà comme une fin de non-recevoir.

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« La FAF a le droit de faire un recours, car le but de Slimani est selon moi valable. J’ignore ce qu’elle a dans son dossier, mais je doute que cela puisse aboutir, à moins qu’il y ait des éléments contre l’arbitre », soupire l’ancien international et sélectionneur algérien Ali Fergani.

Un précédent en 2017

Pourtant, l’histoire récente rappelle que la Fifa a fait rejouer, en 2017, un match entre l’Afrique du Sud et le Sénégal, qualificatif pour la Coupe du Monde 2018 en Russie, après avoir établi des faits de « manipulation ».

Le 16 novembre 2016, à Polokwane, les Sud-Africains avaient dominé les Lions de la Teranga (2-1), lors de la deuxième journée du dernier tour des éliminatoires, notamment grâce à un penalty pour une main imaginaire d’un Sénégalais accordé aux Bafana Bafana par l’arbitre ghanéen Joseph Lamptey.

Ce dernier avait d’abord écopé d’une suspension de trois mois par la Confédération africaine de football (CAF), avant d’être radié à vie par la Fifa. Celle-ci l’avait reconnu coupable « d’influence illégale sur le résultat d’un match », et avait décidé, le 6 septembre 2017, de faire rejouer celui-ci, alors que le Sénégal était à la lutte avec le Burkina Faso pour une qualification en phase finale.

Le match avait été rejoué le 10 novembre 2017, à Polokwane, et les Sénégalais s’étaient imposés (2-0), validant ainsi leur présence en Russie l’année suivante. Un ancien membre de la Fifa, qui a souhaité conserver l’anonymat, n’imagine pas une seconde que son ancien employeur décide de faire rejouer le match.

« La fédération algérienne sait pertinemment que sa démarche n’aboutira pas, à moins qu’elle ne prouve que l’arbitre a été corrompu. Imputer l’élimination à l’arbitre est une façon de calmer un peu les supporteurs. Une qualification aurait probablement arrangé le pouvoir politique. L’Algérie a été éliminée, alors qu’elle avait largement les moyens de se qualifier, en encaissant un but idiot à dix secondes de la fin de la prolongation parce que les défenseurs n’ont pas fait leur travail. C’est l’histoire du foot. »

Belmadi : partira, partira pas ?

Mais la principale question que se posent les supporteurs des Fennecs depuis le coup de massue infligé par le Cameroun mardi soir à Blida concerne Djamel Belmadi (46 ans). Le sélectionneur algérien, qui reste très populaire depuis la CAN remportée en 2019 au Caire et malgré l’échec lors de l’édition 2022 au Cameroun avec une élimination au premier tour, n’a encore pris aucune décision.

La tendance serait à un départ, puisque le technicien avait laissé entendre qu’il quitterait ses fonctions en cas d’élimination. Mais Amara, lors de sa dernière conférence de presse, a indiqué que le staff technique pourrait finalement rester en place. La réponse du sélectionneur devrait intervenir dans les prochains jours.

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