RDC : l’Église veut écarter les prêtres qui ont des enfants
À quelques mois d’une visite papale, la conférence épiscopale congolaise enjoint officiellement tout prêtre ayant un enfant à renoncer à son sacerdoce. Levée d’un tabou ?
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 5 avril 2022 Lecture : 2 minutes.
Succédant à l’austère et secret Benoît XVI, le débonnaire et transparent pape François entendait nettoyer les écuries d’Augias d’une Église quelque peu vermoulue sur le plan moral. Même si le chef de l’État du Vatican n’oublie pas qu’avec la crise des vocations occidentales, l’avenir de la chrétienté se situe sur le continent africain, notamment en Éthiopie, au Nigeria et en République démocratique du Congo. Détour ukrainien ou pas, le séjour du Saint-Père en RDC est déjà calé. Du 2 au 5 juillet prochain, il séjournera dans ce pays où les 47 diocèses de l’Église catholique revendiquent 40% des près de 90 millions d’habitants du pays.
Est-ce la perspective de cet audit informel qui pousse la Conférence épiscopale de République démocratique du Congo (Cenco) à mettre de l’ordre dans ses petites affaires ? Sa Sainteté François ayant à cœur le bien-être des enfants et l’Église de l’ex-Zaïre tardant à répondre aux appels de l’ONG « Ligue de la zone Afrique pour la défense des droits des enfants et élèves » (Lizadeel) concernant la pédophilie, les évêques ont décidé de diriger leur bienveillance vers d’autres bambins : les enfants de prêtres pourtant soumis au vœu de chasteté. Et les prélats de regretter que ces « fruits du péché […] souffrent dans le silence ».
Assumer les débordements de la chair
Que les hommes en soutanes placent des « polichinelles dans les tiroirs » est, justement, un secret de Polichinelle. Publié le 4 mars, un document officiel de la Cenco tend à lever le tabou. Certes, la conférence épiscopale explique, un tant soit peu, les raisons actuelles de la violation des engagements sacerdotaux : « le mouvement de la liberté sexuelle qui se mondialise » ou « les pesanteurs culturelles dans certains milieux qui ne connaissent pas d’interdit sur le plan sexuel ».
Nous demandons à tout prêtre […] ayant un enfant d’aller s’en occuper complètement
Mais l’originalité de l’écrit réside dans l’exhortation des évêques à assumer les débordements de la chair : « Considérant d’une part les droits et obligations des parents à l’égard » de leur famille, « d’autre part l’incompatibilité de la charge de père de famille avec le ministère et la vie sacerdotale en régime catholique romain, nous demandons à tout prêtre […] ayant un enfant d’aller s’en occuper complètement et pour ce faire de solliciter la dispense des obligations sacerdotales auprès du Saint-Père. »
« Papas, démission ! » La soudaine lumière projetée sur un clergé opaque sera réellement inédite si l’Église met à exécution sa menace de « présenter au Saint-Siège pour la peine maximale de renvoi de l’État clérical » les cas de prêtres avec descendance qui feraient la sourde oreille à l’appel. Clin d’œil au pape, le document de 19 pages des évêques s’intitule « À l’école de Jésus-Christ. Pour une vie sacerdotale authentique ». Authentiquement révolutionnaire ?
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